Savitri - Book Six - Canto 1
B OOK S IX – C ANTO 1 – T HE W ORD OF F ATE L IVRE S IX – C HANTE 1 – L A P AROLE DU D ESTIN
SAVITRI S RI A UROBINDO
French translation by: Divakar Jeanson www.divakar-publications.com
BOOK SIX - The Book of Fate
LIVRE SIX – Le Livre du Destin
Canto One - The Word of Fate
Chant Un – La Parole du Destin
In silent bounds bordering the mortal's plane Crossing a wide expanse of brilliant peace Narad the heavenly sage from Paradise Came chanting through the large and lustrous air. Attracted by the golden summer-earth That lay beneath him like a glowing bowl Tilted upon a table of the Gods, Turning as if moved round by an unseen hand To catch the warmth and blaze of a small sun, He passed from the immortals' happy paths To a world of toil and quest and grief and hope, To these rooms of the see-saw game of death with life. Across an intangible border of soul-space He passed from Mind into material things Amid the inventions of the inconscient Self And the workings of a blind somnambulist Force. Below him circling burned the myriad suns: He bore the ripples of the etheric sea; A primal Air brought the first joy of touch; A secret Spirit drew its mighty breath
En bonds silencieux vers le plan du mortel Par une large étendue de paix scintillante Narad, le sage céleste du Paradis, S’approchait en chantant dans l’air lumineux. Attiré par la terre dorée de l’été Posée sous lui comme une coupe brillante
Inclinée sur une table des Dieux Par une main invisible pour capter La chaleur et l’éclat d’un petit soleil,
Il passait des voies des immortels à un monde De labeur et de quête, de malheur et d’espoir, A ces lieux du jeu de la mort avec l’existence. Franchissant une frontière d’âme intangible, Du Mental il passa dans les choses matérielles Parmi les inventions du Soi inconscient Et les opérations d’une Force somnambule. Plus bas, tournait brûlante la myriade des astres : Il ressentit l’ondoiement de la mer éthérique ; Un Air primordial apporta la joie du toucher ; Un Esprit secret respirait puissamment Contractant et déployant cet énorme monde En un circuit formidable à travers le Vide ; La force occulte du Feu créatif exposait Sa triple capacité de construire et la danse Tisserande de ses particules et ses ondes, Ses nébuleuses arrimant la forme et la masse, Modèle et fondation magiques d’un univers,
Contracting and expanding this huge world In its formidable circuit through the Void; The secret might of the creative Fire Displayed its triple power to build and form, Its infinitesimal wave-sparks' weaving dance, Its nebulous units grounding shape and mass, Magic foundation and pattern of a world,
Its radiance bursting into the light of stars; He felt a sap of life, a sap of death; Into solid Matter's dense communion Plunging and its obscure oneness of forms He shared with a dumb Spirit identity. He beheld the cosmic Being at his task, His eyes measured the spaces, gauged the depths, His inner gaze the movements of the soul, He saw the eternal labour of the Gods, And looked upon the life of beasts and men. A change now fell upon the singer's mood, A rapture and a pathos moved his voice; He sang no more of Light that never wanes, And oneness and pure everlasting bliss, He sang no more the deathless heart of Love, His chant was a hymn of Ignorance and Fate. He sang the name of Vishnu and the birth And joy and passion of the mystic world, And how the stars were made and life began And the mute regions stirred with the throb of a Soul. He sang the Inconscient and its secret self, Its power omnipotent knowing not what it does, All-shaping without will or thought or sense, Its blind unerring occult mystery, And darkness yearning towards the eternal Light, And Love that broods within the dim abyss And waits the answer of the human heart, And death that climbs to immortality. He sang of the Truth that cries from Night's blind deeps, And the Mother-Wisdom hid in Nature's breast And the Idea that through her dumbness works
Sa radiance explosant dans la clarté des étoiles ; Il sentit une sève de vie, sève de mort ; Dans la communion dense de la Matière Il plongea, et l’obscure union de ses formes Il partagea, comme une inertie de l’Esprit. Il entrevit l’Etre cosmique à sa tâche, ses yeux Mesurèrent les espaces, jaugèrent les fonds, Son regard intérieur les mouvements de l’âme, Il vit les Dieux à leur labeur éternel, Il vit l’existence des bêtes et des hommes. Un changement vint alors sur l’humeur du chanteur, Une intensité de pathos anima sa voix ; Il ne chantait plus la Lumière pérenne, L’union et la pure béatitude éternelle, Il ne chantait plus le cœur immortel de l’Amour, Son chant était un hymne de l’Ignorance. Il chantait le nom de Vishnu, la naissance, la joie Et la passion du monde mystique, et comment Vinrent les étoiles et la vie commença Et le Vide s’éveilla au battement d’une Ame. Il chantait l’Inconscient et son soi secret, Son omnipotence qui ne sait ce qu’elle fait, Façonnant tout sans le vouloir, penser ou sentir,
Son aveugle mystère occulte infaillible, Et la ténèbre qui aspire vers la Lumière, Et l’Amour qui plane dans l’obscur abysse Et attend la réponse du cœur humain, Et la mort qui monte vers l’immortalité. Il chantait la Vérité qui crie dans la Nuit, Et la Sagesse cachée au sein de la Nature Et l’Idée qui s’élabore à travers elle
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And the miracle of her transforming hands, Of life that slumbers in the stone and sun And Mind subliminal in mindless life, And the Consciousness that wakes in beasts and men. He sang of the glory and marvel still to be born, Of Godhead throwing off at last its veil, Of bodies made divine and life made bliss, Immortal sweetness clasping immortal might, Heart sensing heart, thought looking straight at thought, And the delight when every barrier falls, And the transfiguration and the ecstasy. And as he sang the demons wept with joy Foreseeing the end of their long dreadful task And the defeat for which they hoped in vain, And glad release from their self-chosen doom And return into the One from whom they came.
Et le miracle de ses mains qui transmuent, La vie qui sommeille dans la pierre et le soleil Et le Mental subliminal au-dedans d’elle, Et la Conscience qui naît dans la bête et dans l’homme. Il chantait la gloire et la merveille à venir, La Divinité rejetant enfin son voile, Les corps divins et la vie bienheureuse, Douceur et puissance s’étreignant immortelles, Le cœur vibrant au cœur, la pensée ouverte, Et la joie quand tombent toutes les barrières Et viennent la transfiguration et l’extase. Et à son chant les démons pleuraient de joie Voyant la fin de leur longue et terrible besogne Lui qui a conquis les sièges des Immortels, Descendit aux humains sur la terre, l’Homme divin. Comme le dard d’un éclair une gloire tomba Jusqu’à ce que les yeux calmes du sage regardent A travers les nuées et l’étrange tracé De son visage, tel un masque de joie antique, Apparaisse dans la lumière où se dressait Le palais du roi Aswapati, dans les vents De Madra, comme une fleur de pierre ouvragée. L’y reçurent le roi pensif et, à son côté, Une créature belle et sage et passionnée, Aspirant telle une flamme sacrificielle Dans l’air limpide depuis son siège de terre, La reine, et la mère humaine de Savitri. Là, pour une heure abritée de l’assaut du monde, Et la défaite qu’ils avaient en vain espérée, La délivrance du sort que jadis ils choisirent Et le retour dans l’Un Qui fut leur origine.
He who has conquered the Immortals' seats, Came down to men on earth the Man divine.
As darts a lightning streak, a glory fell Nearing until the rapt eyes of the sage Looked out from luminous cloud and, strangely limned,
His face, a beautiful mask of antique joy, Appearing in light descended where arose King Aswapati's palace to the winds In Madra, flowering up in delicate stone.
There welcomed him the sage and thoughtful king, At his side a creature beautiful, passionate, wise, Aspiring like a sacrificial flame Skyward from its earth-seat through luminous air, Queen-browed, the human mother of Savitri. There for an hour untouched by the earth's siege
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They ceased from common life and care and sat Inclining to the high and rhythmic voice, While in his measured chant the heavenly seer Spoke of the toils of men and what the gods Strive for on earth, and joy that throbs behind The marvel and the mystery of pain. He sang to them of the lotus-heart of love With all its thousand luminous buds of truth, Which quivering sleeps veiled by apparent things. It trembles at each touch, it strives to wake And one day it shall hear a blissful voice And in the garden of the Spouse shall bloom When she is seized by her discovered lord. A mighty shuddering coil of ecstasy Crept through the deep heart of the universe. Out of her Matter's stupor, her mind's dreams, She woke, she looked upon God's unveiled face. Even as he sang and rapture stole through earth-time And caught the heavens, came with a call of hooves, As of her swift heart hastening, Savitri; Her radiant tread glimmered across the floor. A happy wonder in her fathomless gaze, Changed by the halo of her love she came; Her eyes rich with a shining mist of joy As one who comes from a heavenly embassy Discharging the proud mission of her heart,
Retirés des soucis de la vie ordinaire Ils s’inclinèrent à la haute voix rythmique, Tandis que de son chant mesuré le voyant Disait les labeurs des hommes, et ce que les dieux Tentent sur la terre, et la joie qui bat en arrière De la merveille et du mystère de la peine. Il leur chanta le cœur de lotus de l’amour, Aux milliers de boutons lumineux de vérité, Qui frémit endormi derrière les apparences. Il tremble à chaque contact, il veut s’éveiller Et un jour il entendra une voix bienheureuse Et dans le jardin de l’Epouse fleurira Quand, découvert, son seigneur se saisira d’elle. Le puissant tressaillement d’un serpent d’extase S’insinue dans le cœur profond de l’univers. De la stupeur de sa Matière, comme de ses rêves, Elle s’éveille et voit, dévoilé, Son visage. Alors qu’il chantait encore et ravissait la terre Et les cieux, il y eut un son de cavalcade Comme de son cœur se hâtant, et vint Savitri ; La radiance de son pas scintilla sur le sol. Un émerveillement dans son regard insondable, Changée par le halo de son amour elle vint ; Ses yeux riches d’une buée de joie rayonnante, Telle l’émissaire d’une céleste ambassade S’acquittant de la fière mission de son cœur, Portant avec elle la sanction des dieux A son amour et sa lumineuse éternité, Elle se tint devant le trône de son père - Ardente de la beauté sur la terre nouvelle Transformée dans le miracle de son cœur -,
One carrying the sanction of the gods To her love and its luminous eternity,
She stood before her mighty father's throne And, eager for beauty on discovered earth Transformed and new in her heart's miracle-light,
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Saw like a rose of marvel, worshipping, The fire-tinged sweetness of the son of Heaven.
Et elle vit, telle une rose de merveille, La douceur teintée de feu de l’envoyé du Ciel.
He flung on her his vast immortal look; His inner gaze surrounded her with its light
Et Narad posa sur elle son vaste regard, L’entourant toute entière de sa lumière Et, retenant de ses lèvres la connaissance, Il s’écria vers elle, « Qui vient là, la fiancée, Fille de la flamme, et autour de sa tête Versant leurs clartés les pompes nuptiales Etincelantes ? De quelles vertes clairières Retirées sous la rosée, de quelle rive D’eaux scintillantes de lune apportes-tu Cette gloire qui habite ces yeux enchantés ? La terre a des étendues d’or, et des collines Qui la nuit couvrent leurs têtes comme des songes, Et, gardées dans le cloître joyeux de la forêt, Des berges abritées s’abîment dans l’extase Saisies par les mains courbées incessantes Et les ondes passionnées de la rivière offerte : Dans la fraîcheur murmurante de sa pure étreinte Elles perdent leurs âmes sur des lits de roseaux. Et ce sont toutes de mystérieuses présences En lesquelles réside un bonheur spirituel Et à la joie elles livrent le coeur humain. T’es-tu, là, arrêtée, émerveillée par des yeux Inconnus, ou par une voix perçue en ton âme Qui força ta vie à se tendre enchantée ? Si ma pensée pouvait croire ce vibrant regard, Elle dirait que tu n’as pas bu de la terre Mais, franchissant les rideaux azurés du midi, Te trouvas entourée sur une berge magique De contrées trop radieuses pour des yeux humains.
And reining back knowledge from his immortal lips He cried to her, “Who is this that comes, the bride, The flame-born, and round her illumined head Pouring their lights her hymeneal pomps Move flashing about her? From what green glimmer of glades Retreating into dewy silences Or half-seen verge of waters moon-betrayed Bringst thou this glory of enchanted eyes? Earth has gold-hued expanses, shadowy hills That cowl their dreaming phantom heads in night, And, guarded in a cloistral joy of woods, Screened banks sink down into felicity Seized by the curved incessant yearning hands And ripple-passion of the upgazing stream: Amid cool-lipped murmurs of its pure embrace They lose their souls on beds of trembling reeds. And all these are mysterious presences In which some spirit's immortal bliss is felt, And they betray the earth-born heart to joy. There hast thou paused, and marvelling borne eyes Unknown, or heard a voice that forced thy life To strain its rapture through thy listening soul? Or, if my thought could trust this shimmering gaze, It would say thou hast not drunk from an earthly cup, But stepping through azure curtains of the noon Thou wast surrounded on a magic verge In brighter countries than man's eyes can bear.
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Assailed by trooping voices of delight And seized mid a sunlit glamour of the boughs In faery woods, led down the gleaming slopes Of Gandhamadan where the Apsaras roam, Thy limbs have shared the sports which none has seen, And in god-haunts thy human footsteps strayed, Thy mortal bosom quivered with god-speech And thy soul answered to a Word unknown. What feet of gods, what ravishing flutes of heaven Have thrilled high melodies round, from near and far Approaching through the soft and revelling air, Which still surprised thou hearest? They have fed Thy silence on some red strange-ecstasied fruit And thou hast trod the dim moon-peaks of bliss. Reveal, O winged with light, whence thou hast flown Hastening bright-hued through the green tangled earth, Thy body rhythmical with the spring-bird's call. The empty roses of thy hands are filled Only with their own beauty and the thrill Of a remembered clasp, and in thee glows A heavenly jar, thy firm deep-honied heart, New-brimming with a sweet and nectarous wine. Thou hast not spoken with the kings of pain. Life's perilous music rings yet to thy ear Far-melodied, rapid and grand, a Centaur's song, Or soft as water plashing mid the hills, Or mighty as a great chant of many winds. Moon-bright thou livest in thy inner bliss. Thou comest like a silver deer through groves Of coral flowers and buds of glowing dreams, Or fleest like a wind-goddess through leaves, Or roamst, O ruby-eyed and snow-winged dove,
Assaillie par mille voix de plaisir et saisie Entre les rameaux splendides de bois féeriques, Emportée le long des versants étincelants De Gandhamadan où musardent les Apsaras, Tes membres ont connu des jeux jamais contemplés Et dans les antres des dieux tes pas ont erré Et ton sein a tremblé d’un langage sublime Et ton âme a répondu à un Verbe inconnu. Quels pieds adorables, quelles flûtes ravissantes Ont modulé ces mélodies, de près et de loin S’approchant dans le doux tumulte de l’air, Qu’encore surprise tu entends ? Ils ont nourri Ton silence d’un étrange fruit rouge d’extase Et tu as foulé des cimes de félicité. Révèle, O ailée de lumière, d’où tu as volé, Vive et claire, à travers les forêts de la terre, Le rythme de l’oiseau du printemps dans ton corps. Les roses vides de tes mains ne contiennent Que leur propre beauté qui frémit encore Tu n’as pas conversé avec les rois de la peine. Et pourtant résonne au loin l’harmonie périlleuse De la vie, rapide comme le chant d’un Centaure, Ou douce comme le ruisseau dans les collines, Ou majestueuse comme un grand hymne des vents. Telle une lune tu vis dans ta joie intérieure. Tu viens comme une biche argentée en des bocages De fleurs de corail et de bourgeons luminescents, Ou comme une déesse du vent dans les feuillages Ou voltiges, O blanche colombe aux yeux de rubis, D’une étreinte souvenue, et luit en toi Une jarre céleste, ton doux cœur profond Fraîchement empli d’un vin de nectar.
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Flitting through thickets of thy pure desires In the unwounded beauty of thy soul. These things are only images to thy earth, But truest truth of that which in thee sleeps. For such is thy spirit, a sister of the gods, Thy earthly body lovely to the eyes And thou art kin in joy to heaven's sons.
Parmi les fourrés et les buissons de tes désirs Dans la pure beauté indemne de ton âme. Ces choses ne sont que des images pour le monde, Mais la vraie vérité de ce qui en toi repose. Car tel est ton esprit, une sœur pour les dieux, Et ton corps terrestre est adorable à leurs yeux, Et dans la joie tu es semblable à eux. O toi qui es venue à ce monde redoutable, Que tu ne vois encore qu’au travers de tes songes, Où ni l’amour ni la beauté ne sont saufs, Toi-même un être dangereusement grand, Une âme seule dans un havre doré A vécu emmurée dans l’abri de tes rêves. Sur d’heureuses hauteurs laissant dormir le sort Qui traque les vies des hommes sans qu’ils le voient, Si ton cœur pouvait vivre cloîtré dans l’idéal, Aussi haut, et heureux, pourrait être ton éveil ! Si le sort, pour le temps entier, pouvait dormir ! » Ainsi Narad retint-il des mots sa connaissance. Comme un nuage qui laisse rire les éclairs, Mais retient encore le tonnerre dans son cœur, Il ne laissait échapper que de vives images. Ses paroles chatoyantes voilaient ses pensées ; Comme un vent vient flatter l’air brillant de l’été, Prenant pitié des mortels, il ne leur parlait Que de beauté vivante et du bonheur présent : Le reste il voilait dans son esprit omniscient.
O thou who hast come to this great perilous world Now only seen through the splendour of thy dreams, Where hardly love and beauty can live safe, Thyself a being dangerously great, A soul alone in a golden house of thought Has lived walled in by the safety of thy dreams. On heights of happiness leaving doom asleep Who hunts unseen the unconscious lives of men, If thy heart could live locked in the ideal's gold, He spoke but held his knowledge back from words. As a cloud plays with lightnings' vivid laugh, But still holds back the thunder in its heart, Only he let bright images escape. His speech like glimmering music veiled his thoughts; As a wind flatters the bright summer air, Pitiful to mortals, only to them it spoke Of living beauty and of present bliss: He hid in his all-knowing mind the rest. To those who hearkened to his celestial voice, The veil heaven's pity throws on future pain The Immortals' sanction seemed of endless joy. As high, as happy might thy waking be! If for all time doom could be left to sleep!”
A ceux qui écoutaient sa voix céleste, l’écran Que pose la pitié sur la peine à venir Semblait la sanction des dieux à la joie.
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But Aswapati answered to the seer;— His listening mind had marked the dubious close, An ominous shadow felt behind the words, But calm like one who ever sits facing Fate Here mid the dangerous contours of earth's life, He answered covert thought with guarded speech: “O deathless sage who knowest all things here, If I could read by the ray of my own wish Through the carved shield of symbol images Which thou hast thrown before thy heavenly mind I might see the steps of a young godlike life Happily beginning luminous-eyed on earth; Between the Unknowable and the Unseen Born on the borders of two wonder-worlds, For it has read and broken the wizard seals; It has drunk of the Immortal's wells of joy, It has looked across the jewel bars of heaven, It has entered the aspiring Secrecy, It sees beyond terrestrial common things And communes with the Powers that build the worlds, Till through the shining gates and mystic streets Of the city of lapis lazuli and pearl Proud deeds step forth, a rank and march of gods. Although in pauses of our human lives Earth keeps for man some short and perfect hours When the inconstant tread of Time can seem The eternal moment which the deathless live, Yet rare that touch upon the mortal's world: Hardly a soul and body here are born In the fierce difficult movement of the stars, It flames out symbols of the infinite And lives in a great light of inner suns.
Pourtant Aswapati répondit au voyant, - Son esprit attentif avait noté l’équivoque Et senti derrière les mots une ombre sinistre Mais, toujours calme face au Destin ici-bas Parmi les dangereux contours de la vie terrestre, Il usa à son tour d’un langage prudent : « O sage immortel qui connais tout de la terre, Si je pouvais lire par le rayon de mon souhait A travers le bouclier d’images symboles Que tu as projeté au devant de ta pensée, Je verrais la marche d’une jeune vie sublime, Heureuse et lumineuse, commencer dans ce monde ; Née entre l’Inconnaissable et l’Invisible, Sur les frontières de deux mondes merveilleux, Elle flamboie des signes de l’infini Dans une grande clarté de soleils intérieurs. Car elle a lu et brisé les sceaux ensorcelés ; Elle a bu aux puits de joie de l’Immortel, Elle a regardé entre les barreaux de diamant Et elle a pénétré le Secret qui aspire : Elle voit par-delà la vie terrestre ordinaire, Communiant avec les Pouvoirs qui créent l’univers, Jusqu’à ce que, par les portes et les rues mystiques De la cité de lapis-lazuli et de perle, De fiers actes s’avancent, telle une armée de dieux. Bien qu’à certaines pauses de nos vies, la terre Garde pour l’homme quelques heures parfaites Quand la marche inconstante du Temps peut sembler Le moment éternel que vivent les sans-morts, Rare est pourtant ce toucher sur le monde mortel : Rares sont l’âme et le corps nés ici-bas Dans le mouvement âpre et brutal des étoiles,
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Whose life can keep the paradisal note, Its rhythm repeat the many-toned melody Tirelessly throbbing through the rapturous air Caught in the song that sways the Apsara's limbs When she floats gleaming like a cloud of light, A wave of joy on heaven's moonstone floor. Behold this image cast by light and love, A stanza of the ardour of the gods Perfectly rhymed, a pillared ripple of gold! Her body like a brimmed pitcher of delight Shaped in a splendour of gold-coloured bronze As if to seize earth's truth of hidden bliss. Dream-made illumined mirrors are her eyes Draped subtly in a slumbrous fringe of jet, Retaining heaven's reflections in their depths. Even as her body, such is she within. Heaven's lustrous mornings gloriously recur, Like drops of fire upon a silver page, In her young spirit yet untouched with tears. All beautiful things eternal seem and new To virgin wonder in her crystal soul. The unchanging blue reveals its spacious thought; Marvellous the moon floats on through wondering skies; Earth's flowers spring up and laugh at time and death; The charmed mutations of the enchanter life Race like bright children past the smiling hours. If but this joy of life could last, nor pain
Dont la vie puisse garder la note divine - Et son rythme répéter la mélodie multiple Vibrant inlassablement dans l’air enivré, Capté dans le chant qui fait danser l’Apsara Quand elle flotte comme une nuée de lumière, Une onde de joie sur les dalles blanches du ciel. Vois cette image, coulée par le soleil et l’amour, Une stance de l’ardeur des immortels, parfaite Dans ses rimes, l’ondoiement d’un pilier d’or ! Regarde son corps, une cruche emplie d’élixir Façonnée dans la splendeur d’un bronze doré Comme pour saisir le bonheur caché de la terre ! Des miroirs de songe illuminés sont ses yeux Subtilement drapés d’une frange de jais, Retenant au fond d’eux les reflets des cieux. Et pareille à son corps est-elle au-dedans. Les matins lustrés du paradis se succèdent, Gouttes de feu sur une page argentée, Dans son jeune esprit encore libre des larmes. Tout ce qui est beau semble éternel et nouveau A l’innocence de son âme de cristal. Le bleu du ciel révèle sa pensée d’espace, La lune vogue dans la nuit enchantée, Les fleurs se rient du temps et de la mort ; Les mutations charmées de la vie magicienne Courent et s’égaient devant les heures souriantes. Si seulement cette joie pouvait durer, la peine Ne jamais sonner sa note d’airain dans ses jours ! Regarde-la, O chanteur aux yeux de prophète, Et bénis cette belle enfant de ton chant, Qu’elle verse le nectar d’une vie sans chagrin Tout autour d’elle de son cœur d’amour clair,
Throw its bronze note into her rhythmed days! Behold her, singer with the prescient gaze, And let thy blessing chant that this fair child Shall pour the nectar of a sorrowless life Around her from her lucid heart of love,
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Heal with her bliss the tired breast of earth And cast like a happy snare felicity.
Et guérisse avec sa joie le sein las de la terre Et jette sur tous un vaste filet de bonheur. Comme croît et s’épand le grand arbre tutélaire Qui fleurit sur les rives de l’Alacananda Dont les eaux sémillantes s’élancent en hâte, Ecumant et gargouillant à la splendeur du jour Pour enserrer de leur rire les genoux Des filles du ciel, leurs membres dorés et cheveux De nuée tout ruisselants de perles de pluie, - Telles sont ses aurores, feuilles serties de lumière, Ainsi étend-elle sur tous sa félicité. Telle une flamme de bonheur elle naquit Et sûrement cette flamme éclairera la terre : Sûrement le sort lui permettra de passer ! Mais trop souvent ici la Mère insouciante laisse Ses élus aux mains envieuses du Destin : La harpe de Dieu se tait, son appel à la joie Se décourage parmi les sons de la terre ; Les cordes de l’Extase n’y peuvent vibrer Ou sont bientôt étouffées dans le cœur humain. Nous avons assez des chants du chagrin : qu’une fois Ses jours bienheureux portent le ciel ici-bas ! Le feu doit-il toujours éprouver les grandes âmes ? Qu’une fois, sur la chaussée redoutable des Dieux, L’amour et la foi et la joie sacrée pour armure, Une voyageuse à la demeure du Sans-Mort Puisse traverser indemne une vie mortelle. » Mais Narad répondit d’abord par le silence, Sachant que les mots sont vains et le Destin est roi. Il regarda l’invisible avec des yeux qui voient, Puis, jouant avec l’ignorance du mortel
As grows the great and golden bounteous tree Flowering by Alacananda's murmuring waves, Where with enamoured speed the waters run Lisping and babbling to the splendour of morn And cling with lyric laughter round the knees Of heaven's daughters dripping magic rain Pearl-bright from moon-gold limbs and cloudy hair, So are her dawns like jewelled leaves of light, So casts she her felicity on men. A flame of radiant happiness she was born And surely will that flame set earth alight: Doom surely will see her pass and say no word! But too often here the careless Mother leaves Her chosen in the envious hands of Fate: The harp of God falls mute, its call to bliss Discouraged fails mid earth's unhappy sounds; The strings of the siren Ecstasy cry not here Or soon are silenced in the human heart. Of sorrow's songs we have enough: bid once Her glad and griefless days bring heaven here. Or must fire always test the great of soul? Along the dreadful causeway of the Gods, Armoured with love and faith and sacred joy, A traveller to the Eternal's house, Once let unwounded pass a mortal life.” But Narad answered not; silent he sat, Knowing that words are vain and Fate is lord. He looked into the unseen with seeing eyes, Then, dallying with the mortal's ignorance
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Like one who knows not, questioning, he cried: “On what high mission went her hastening wheels? Whence came she with this glory in her heart And Paradise made visible in her eyes? What sudden God has met, what face supreme?” To whom the king, “The red asoca watched Her going forth which now sees her return. Arisen into an air of flaming dawn Like a bright bird tired of her lonely branch, To find her own lord, since to her on earth He came not yet, this sweetness wandered forth Cleaving her way with the beat of her rapid wings. Led by a distant call her vague swift flight Threaded the summer morns and sunlit lands. The happy rest her burdened lashes keep And these charmed guardian lips hold treasured still. Virgin who comest perfected by joy, Reveal the name thy sudden heart-beats learned. Whom hast thou chosen, kingliest among men?” And Savitri answered with her still calm voice As one who speaks beneath the eyes of Fate: “Father and king, I have carried out thy will. One whom I sought I found in distant lands; I have obeyed my heart, I have heard its call. On the borders of a dreaming wilderness Mid Shalwa's giant hills and brooding woods In his thatched hermitage Dyumatsena dwells, Blind, exiled, outcast, once a mighty king. The son of Dyumatsena, Satyavan, I have met on the wild forest's lonely verge.
Comme celui qui ne sait pas, il demanda : « Pour quelle haute mission s’en fut son chariot ? Et d’où revint-elle, cette gloire dans son coeur Et le Paradis rendu visible dans ses yeux ? Quel Dieu rencontra-t-elle, quel visage suprême ? » Le roi : « La fleur pourpre de l’Asoka l’a vue S’en aller qui maintenant la voit revenir. S’élevant dans l’air d’une aurore enflammée Telle une oiselle de sa branche solitaire, Pour trouver son seigneur, puisqu’à elle sur la terre Il n’était venu, cette douceur s’en fut, Fendant son chemin de ses ailes rapides. Guidée par un distant appel elle s’envola Par les terres ensoleillées un matin d’été. Le reste bienheureux ses cils encore retiennent Et ces lèvres gardiennes préservent encore. O vierge qui viens parfaite par la joie, révèle Le nom qu’apprit le battement soudain de ton cœur. Qui as-tu choisi, le plus royal entre les hommes ? » Et Savitri répondit de sa voix tranquille Comme celle qui parle sous les yeux du Destin : « Mon père et mon roi, j’ai accompli ta volonté. Celui que je cherchais j’ai trouvé loin de ces terres ; J’ai obéi à mon cœur, entendu son appel. Sur les frontières d’une aire de songe, à Shalwa, Parmi les collines géantes au sein des bois, Dans son ermitage de chaume, vit Dyumatsena, Aveugle, exilé, proscrit, jadis un puissant roi. Le fils de Dyumatsena, Satyavan, J’ai rencontré à l’orée de la forêt sauvage.
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My father, I have chosen. This is done.”
Mon père, j’ai choisi. Ceci est accompli. »
Astonished, all sat silent for a space. Then Aswapati looked within and saw A heavy shadow float above the name Chased by a sudden and stupendous light; He looked into his daughter's eyes and spoke: “Well hast thou done and I approve thy choice. If this is all, then all is surely well; If there is more, then all can still be well. Whether it seem good or evil to men's eyes, Only for good the secret Will can work. Our destiny is written in double terms: Through Nature's contraries we draw nearer God; Out of the darkness we still grow to light. Death is our road to immortality. `Cry woe, cry woe,' the world's lost voices wail, Yet conquers the eternal Good at last.” Then might the sage have spoken, but the king In haste broke out and stayed the dangerous word: “O singer of the ultimate ecstasy, Lend not a dangerous vision to the blind Because by native right thou hast seen clear. Impose not on the mortal's tremulous breast The dire ordeal that foreknowledge brings; Demand not now the Godhead in our acts. Here are not happy peaks the heaven-nymphs roam Or Coilas or Vaicountha's starry stair: Abrupt, jagged hills only the mighty climb Are here where few dare even think to rise; Far voices call down from the dizzy rocks,
Etonnés, tous restèrent silencieux un moment. Puis Aswapati regarda au-dedans et vit Une ombre pesante flotter au-dessus du nom Chassée par une clarté soudaine et stupéfiante ; Il regarda dans les yeux de sa fille et dit : « Tu as bien fait et j’approuve ton choix. Si cela est tout, alors sûrement tout est bien ; S’il y a davantage, tout peut encore être bien. Que cela semble bien ou mal aux yeux des hommes, Pour le bien seul, la secrète Volonté travaille. Notre destinée est écrite en doubles termes : Par les contraires nous nous approchons du Divin ; De l’obscurité nous croissons vers la lumière. La mort est notre route à l’immortalité. ‘Malheur à nous’, s’écrient les voix égarées, C’est pourtant le Bien éternel qui triomphera. » Le sage allait peut-être parler, mais le roi En hâte interjeta, arrêtant les mots fatals : « O chanteur omniscient de l’extase ultime, Ne prête pas à l’aveugle une vue dangereuse Quand bien même de ton droit natif tu vois clair. N’impose pas au sein tremblant du mortel L’épreuve terrible qu’apporte la prescience ; N’exige pas la Divinité dans nos actes. Ni d’heureuses cimes où flânent les nymphes Ni les marches de Coilas ou Vaicountha, Mais des monts escarpés que seuls gravissent les grands Et peu osent même contempler, sont ici-bas ; De la roche abrupte des voix distantes appellent,
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Chill, slippery, precipitous are the paths. Too hard the gods are with man's fragile race; In their large heavens they dwell exempt from Fate And they forget the wounded feet of man, His limbs that faint beneath the whips of grief, His heart that hears the tread of time and death. The future's road is hid from mortal sight: He moves towards a veiled and secret face. To light one step in front is all his hope And only for a little strength he asks To meet the riddle of his shrouded fate. Awaited by a vague and half-seen force, Aware of danger to his uncertain hours He guards his flickering yearnings from her breath; He feels not when the dreadful fingers close Around him with the grasp none can elude. If thou canst loose her grip, then only speak. Perhaps from the iron snare there is escape: Our mind perhaps deceives us with its words And gives the name of doom to our own choice; Perhaps the blindness of our will is Fate.” He said and Narad answered not the king. But now the queen alarmed lifted her voice: “O seer, thy bright arrival has been timed To this high moment of a happy life; Then let the speech benign of griefless spheres Confirm this blithe conjunction of two stars And sanction joy with thy celestial voice. Here drag not in the peril of our thoughts, Let not our words create the doom they fear. Here is no cause for dread, no chance for grief
Froids et glissants et périlleux sont les sentiers. Les dieux sont trop durs avec cette race fragile, Qui, dans leurs cieux, demeurent exempts du Destin, Et ils oublient les pieds lacérés de l’humain, Ses membres qui défaillent sous les fouets du malheur, Son cœur qui ressent les pas du temps et de la mort. La route de l’avenir se dérobe à sa vue : Il s’achemine vers une face voilée. Eclairer le pas suivant est tout son espoir Et il ne demande qu’un peu de vaillance Pour affronter l’énigme de son secret destin. Attendu par une force vague qu’il devine Et conscient du danger pour ses heures précaires, De ce souffle il abrite ses faibles élans ; Il ne sent pas quand les doigts effroyables referment Sur lui l’étreinte que nul ne peut éviter. Parle si seulement tu peux desserrer sa prise, Peut-être au piège de fer y a-t-il une issue : Notre esprit peut-être nous trompe avec ses mots Et donne le nom du sort à notre propre choix, Et c’est notre aveugle vouloir qui est le Destin. » Le roi se tut, et Narad ne lui répondit pas. Mais alors la reine, alarmée, éleva sa voix : « O prophète, ton arrivée radieuse est advenue A ce haut moment d’une heureuse existence ; Qu’ainsi la parole bienveillante des sphères Confirme la conjonction de ces deux étoiles Et sanctionne la joie par ta voix céleste. Ne tire pas ici le péril de nos pensées, Ne laisse pas nos mots créer le sort qu’ils redoutent. Il n’y a pas de raison de craindre que la peine
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To raise her ominous head and stare at love. A single spirit in a multitude, Happy is Satyavan mid earthly men Whom Savitri has chosen for her mate, And fortunate the forest hermitage Where leaving her palace and riches and a throne My Savitri will dwell and bring in heaven. Then let thy blessing put the immortals' seal On these bright lives' unstained felicity Pushing the ominous Shadow from their days. Too heavy falls a Shadow on man's heart; It dares not be too happy upon earth. It dreads the blow dogging too vivid joys, A lash unseen in Fate's extended hand, The danger lurking in fortune's proud extremes, An irony in life's indulgent smile, And trembles at the laughter of the gods. Or if crouches unseen a panther doom, If wings of Evil brood above that house, Then also speak, that we may turn aside And rescue our lives from hazard of wayside doom And chance entanglement of an alien fate.” And Narad slowly answered to the queen: “What help is in prevision to the driven? Safe doors cry opening near, the doomed pass on.
Dresse sa tête menaçante devant l’amour. Un esprit unique dans une multitude, Heureux est Satyavan parmi les hommes Que Savitri a choisi pour son compagnon, Et fortuné est l’ermitage forestier Où, laissant son palais, ses richesses et un trône, Ma Savitri, l’illuminant, viendra demeurer. Que ta bénédiction soit le sceau des immortels Sur la félicité de ces vies rayonnantes, Repoussant l’Ombre sinistre loin de leurs jours. Car trop lourde est cette Ombre sur le cœur de l’homme, Qui n’ose pas être trop heureux sur la terre. Il craint le coup qui harcèle des joies trop vives, La main invisible du Destin qui le cingle, Le danger embusqué dans les fières fortunes, L’ironie dans le sourire indulgent de la vie, Et il tremble quand le rire des dieux retentit. Ou, si le sort est accroupi comme une panthère, Si des ailes de Mal recouvrent cette maison, Alors, dis, que nous puissions nous détourner Et rescaper nos vies d’une ruine accidentelle Et de l’embarras fortuit d’un destin étranger. » Et Narad lentement répondit à la reine : « De quelle aide est la prescience, pour ceux qui sont menés ? La sécurité appelle, mais les condamnés passent.
A future knowledge is an added pain, A torturing burden and a fruitless light On the enormous scene that Fate has built. The eternal poet, universal Mind, Has paged each line of his imperial act; Invisible the giant actors tread
Une prévoyance est une douleur ajoutée, Un fardeau de torture, une lumière stérile Sur l’énorme scène que le Destin a dressée. Poète éternel, le Mental universel A marqué chaque ligne de son acte impérial ; Les acteurs géants invisibles s’avancent
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And man lives like some secret player's mask. He knows not even what his lips shall speak. For a mysterious Power compels his steps And life is stronger than his trembling soul. None can refuse what the stark Force demands: Her eyes are fixed upon her mighty aim; No cry or prayer can turn her from her path. She has leaped an arrow from the bow of God.” His words were theirs who live unforced to grieve And help by calm the swaying wheels of life And the long restlessness of transient things And the trouble and passion of the unquiet world. As though her own bosom were pierced the mother saw Only a larger measure given of tears. Aspiring to the nature of the gods, A mind proof-armoured mailed in mighty thoughts, A will entire couchant behind wisdom's shield, Though to still heavens of knowledge she had risen, Though calm and wise and Aswapati's queen, Human was she still and opened her doors to grief; The stony-eyed injustice she accused Of the marble godhead of inflexible Law, Nor sought the strength extreme adversity brings To lives that stand erect and front the World-Power: Her heart appealed against the impartial judge, Taxed with perversity the impersonal One. Her tranquil spirit she called not to her aid, But as a common man beneath his load Grows faint and breathes his pain in ignorant words, The ancient human sentence strike her child, Her sweetness that deserved another fate
Et l’homme est le masque d’un secret comédien. Il ne sait même pas ce que ses lèvres diront. Car un mystérieux Pouvoir contraint ses pas Et la vie est plus forte que son âme tremblante. Nul ne peut refuser ce qu’exige la Puissance : Ses yeux sont fixés sur son but formidable ; Nulle prière ne peut l’écarter de sa voie. Telle une flèche elle a jailli de l’arc de Dieu. » Ainsi parlent ceux, libres de toute affliction, Qui aident par leur calme les roues de la vie Et la longue anxiété des créatures mortelles Et le trouble et la passion de ce monde inquiet. Comme si c’était son propre sein la mère vit L’ancien jugement humain frapper son enfant, - A sa douceur qui méritait un autre destin N’échoir qu’une plus grande mesure de larmes. Aspirant elle-même à la nature des dieux, Une intelligence armurée de nobles pensées Et défendue par un bouclier de sagesse, Bien qu’à des cieux de connaissance elle eut accédé, Bien qu’elle fut la calme reine d’Aswapati, Humaine était-elle encore et ouverte à la peine ; Elle accusa l’injustice aux yeux de pierre De la divinité de la Loi inflexible, Sans chercher la force que l’adversité porte Aux vies qui se dressent devant la Puissance : Son cœur fit appel contre le juge impartial, Taxant de perversité la Personne suprême. Sans invoquer son esprit tranquille à son aide, Comme un homme ordinaire sous sa charge défaille, Exhalant sa douleur en paroles ignorantes,
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So now she arraigned the world's impassive will: “What stealthy doom has crept across her path Emerging from the dark forest's sullen heart, What evil thing stood smiling by the way And wore the beauty of the Shalwa boy? Perhaps he came an enemy from her past Armed with a hidden force of ancient wrongs, Himself unknowing, and seized her unknown. Here dreadfully entangled love and hate Meet us blind wanderers mid the perils of Time. Our days are links of a disastrous chain, Necessity avenges casual steps; Old cruelties come back unrecognised, The gods make use of our forgotten deeds. Yet all in vain the bitter law was made. Our own minds are the justicers of doom. For nothing have we learned, but still repeat Our stark misuse of self and others' souls. There are dire alchemies of the human heart And fallen from his ethereal element Love darkens to the spirit of nether gods. The dreadful angel, angry with his joys Woundingly sweet he cannot yet forego, Is pitiless to the soul his gaze disarmed, He visits with his own pangs his quivering prey Forcing us to cling enamoured to his grip As if in love with our own agony. This is one poignant misery in the world, And grief has other lassoes for our life. Our sympathies become our torturers. Strength have I my own punishment to bear, Knowing it just, but on this earth perplexed,
Elle incrimina la volonté même du monde : « Quelle ruine s’est glissée sur son chemin
Emergeant du sombre cœur de la forêt, Quel maléfice se tint souriant à sa vue, Revêtant la beauté du garçon de Shalwa ? Peut-être vint-il un ennemi de son passé Armé de la force cachée de méfaits anciens, Sans lui-même le savoir, ni la reconnaître. L’amour et la haine entremêlés nous rencontrent, Errant aveugles parmi les périls du Temps. Nos jours sont des maillons d’une chaîne désastreuse, La Nécessité châtie nos inconséquences ; De vieilles cruautés reviennent masquées, Les dieux font usage de nos faits oubliés. Mais c’est en vain que la loi amère fut conçue. Nous sommes nous-mêmes les justiciers du sort. Car nous n’avons rien appris et répétons encore Notre mésusage de soi comme des autres. Il y a de sombres alchimies du cœur humain Et l’amour, déchu de son élément éthéré, S’obscurcit à l’esprit de dieux inférieurs. L’ange terrible, furieux de ses joies suppliciantes A la douceur desquelles il ne peut renoncer, Est sans pitié pour l’âme qu’il a désarmée ; A sa proie tremblante il inflige ses propres affres, Nous forçant à nous accrocher à son étreinte, Comme épris de notre propre agonie. Voici l’une des misères que souffre ce monde, Et le malheur a d’autres lassos pour notre vie. Nos sympathies deviennent nos tortionnaires. J’ai la force de porter mon propre châtiment, Le sachant juste, mais sur cette terre perplexe,
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Smitten in the sorrow of scourged and helpless things, Often it faints to meet other suffering eyes. We are not as the gods who know not grief And look impassive on a suffering world, Calm they gaze down on the little human scene And the short-lived passion crossing mortal hearts. An ancient tale of woe can move us still, We keep the ache of breasts that breathe no more, Too hard for us is heaven's indifference: Our own tragedies are not enough for us, All pathos and all sufferings we make ours; We have sorrow for a greatness passed away And feel the touch of tears in mortal things. Even a stranger's anguish rends my heart, And this, O Narad, is my well-loved child. Hide not from us our doom, if doom is ours. This is the worst, an unknown face of Fate, A terror ominous, mute, felt more than seen Behind our seat by day, our couch by night, A Fate lurking in the shadow of our hearts, The anguish of the unseen that waits to strike. To know is best, however hard to bear.” We are shaken by the sight of human pain, And share the miseries that others feel. Ours not the passionless lids that cannot age. Then cried the sage piercing the mother's heart, Forcing to steel the will of Savitri, His words set free the spring of cosmic Fate. The great Gods use the pain of human hearts As a sharp axe to hew their cosmic road: They squander lavishly men's blood and tears
Frappée dans la peine de créatures fouettées, Souvent elle me manque devant d’autres souffrances. Nous ne sommes pas des dieux qui ignorent la peine Et regardent impassibles la douleur du monde ; Calmes ils contemplent la petite scène humaine Et la brève passion qui traverse nos cœurs. Le conte d’une ancienne infortune nous émeut, Nous gardons l’angoisse de ceux qui ont succombé, Nous sommes ébranlés par la détresse des autres, Nous partageons les misères que d’autres ressentent. Elles ne sont pas nôtres, ces paupières sans âge ! Trop dure est pour nous l’indifférence du ciel : Nos propres tragédies ne nous suffisent point, Nous adoptons tout le pathos et tous les calvaires ; Nous nous lamentons d’une grandeur disparue Et ressentons des larmes dans les êtres mortels. Même le tourment d’un étranger me déchire, Et ceci, O Narad, est mon enfant bien-aimée. Quel qu’il soit, ne nous cache pas notre sort. Car c’est le pire, une face inconnue du Destin, Une terreur muette, sentie plus que vue, derrière Notre siège le jour et notre couche la nuit, Tapie jusque dans l’ombre même de nos cœurs,
Ce supplice invisible qui attend de frapper. Savoir est mieux, si difficile ce soit-il. »
Alors les mots du sage, perçant le cœur de la mère, Et forçant Savitri à durcir sa volonté, Relâchèrent le courant du Destin cosmique. Les grands Dieux usent de la douleur de nos cœurs Comme d’une hache pour frayer leur passage : Ils prodiguent le sang et les larmes des hommes
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For a moment's purpose in their fateful work. This cosmic Nature's balance is not ours Nor the mystic measure of her need and use. A single word lets loose vast agencies; A casual act determines the world's fate. So now he set free destiny in that hour. “The truth thou hast claimed; I give to thee the truth. A marvel of the meeting earth and heavens Is he whom Savitri has chosen mid men, His figure is the front of Nature's march, His single being excels the works of Time. A sapphire cutting from the sleep of heaven, Delightful is the soul of Satyavan, A ray out of the rapturous Infinite, A silence waking to a hymn of joy. A divinity and kingliness gird his brow; His eyes keep a memory from a world of bliss. As brilliant as a lonely moon in heaven, Gentle like the sweet bud that spring desires, Pure like a stream that kisses silent banks, He takes with bright surprise spirit and sense. A living knot of golden Paradise, A blue Immense he leans to the longing world, Time's joy borrowed out of eternity, A star of splendour or a rose of bliss. In him soul and Nature, equal Presences, Balance and fuse in a wide harmony. The Happy in their bright ether have not hearts More sweet and true than this of mortal make That takes all joy as the world's native gift And to all gives joy as the world's natural right. His speech carries a light of inner truth,
Pour le dessein d’un moment dans leur œuvre fatale. La Nature de cet univers nous échappe, Et la mesure mystique de son équilibre. Un seul mot peut libérer de vastes agences, Un seul acte déterminer le destin du monde. Ainsi Narad, en cette heure, délivra l’avenir. « Tu as réclamé la vérité, je te la donne. Une merveille du ciel qui rencontre la terre Est celui que Savitri a choisi parmi tous, Sa figure est le front de la Nature en progrès, Son seul être surpasse les œuvres du Temps. Un saphir prélevé dans le sommeil des cieux, Adorable est l’âme de Satyavan, pareille A un rayon jailli de l’Infini bienheureux, Un silence s’éveillant à un hymne de joie. Une divine royauté encercle son front ; Ses yeux se souviennent d’un monde de bonheur. Aussi brillant qu’une lune dans le ciel, Aussi tendre qu’un bourgeon qui s’offre au printemps, Aussi pur qu’un torrent qui embrasse ses rives, Son éclat même surprend l’esprit et les sens. Un nœud vivant de l’or céleste, un bleu Immense qui se penche au besoin de la terre, La joie du Temps empruntée à l’éternel, Etoile splendide ou rose de félicité.
En lui âme et Nature, égales Présences, Ont fusionné dans une ample harmonie.
Les Béats dans leur éther n’ont pas de coeurs Plus doux et plus vrais que ce cœur mortel Qui prend toute joie comme le présent du monde Et à tous donne la joie comme un droit naturel. Sa parole est porteuse de lumière intérieure
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And a large-eyed communion with the Power In common things has made veilless his mind, A seer in earth-shapes of garbless deity. A tranquil breadth of sky windless and still Watching the world like a mind of unplumbed thought, A silent space musing and luminous Uncovered by the morning to delight, A green tangle of trees upon a happy hill Made into a murmuring nest by southern winds, These are his images and parallels, His kin in beauty and in depth his peers. A will to climb lifts a delight to live, Heaven's height companion of earth-beauty's charm, His sweetness and his joy attract all hearts To live with his own in a glad tenancy, His strength is like a tower built to reach heaven, A godhead quarried from the stones of life. O loss, if death into its elements Of which his gracious envelope was built, Shatter this vase before it breathes its sweets, As if earth could not keep too long from heaven A treasure thus unique loaned by the gods, A being so rare, of so divine a make! In one brief year when this bright hour flies back And perches careless on a branch of Time, This sovereign glory ends heaven lent to earth, This splendour vanishes from the mortal's sky: Heaven's greatness came, but was too great to stay. Twelve swift-winged months are given to him and her; This day returning Satyavan must die.” An aspiration to the immortals' air Lain on the lap of mortal ecstasy.
Et une communion lucide avec la Puissance Dans les choses communes, a éveillé son mental, Un voyant de la déité nue dans les formes. Une tranquille ampleur d’espace immobile, Une pensée insondable observant le monde, Un milieu silencieux de méditation claire Que chaque matin découvre et livre à la joie, Un fourré d’arbres verts sur une allègre colline Que les vents du Sud ont choisi pour leur nid, Tels sont ses images et ses parallèles, - Parents dans la beauté comme dans la profondeur. Une soif de monter élève un bonheur de vivre, La hauteur du ciel s’alliant au charme terrestre, Une ardente aspiration à l’air des immortels Lovée sur les genoux de l’extase mortelle. Sa douceur et sa joie attirent tous les coeurs A séjourner près du sien dans le contentement, Sa vigueur est une tour érigée vers le ciel, Tel un dieu extrait des carrières de la vie. O quelle perte, si la mort dans ses éléments Dont son enveloppe gracieuse fut bâtie, Fracasse ce vase avant qu’il exhale ses dons, Comme si la terre ne pouvait garder longtemps Un trésor si unique prêté par les dieux, Un être si rare, d’une si sublime facture ! Dans une année brève, quand cette heure reviendra Se percher légère sur une branche du Temps, Cette gloire que prêta le ciel cessera, Cette splendeur s’évanouira de l’air du mortel : La grandeur prit corps mais, trop grande, ne put demeurer.
A lui et elle douze mois ailés sont donnés ; Au retour de ce jour Satyavan devra mourir. »
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