Un Parcours

pain ; le lieu se nommait « Château de Beuvron ». Ils nous invitèrent à essayer d’y vivre et d’y établir quelquechose, sans être eux-mêmes très intéressés. Nous fûmes vite plusieurs à nous mettre au boulot, pour y aménager quelques espaces protégés ; je faisais souvent le voyage entre Paris et « le château », nous rassemblions le peu que chacun pouvait contribuer, faisions des réserves de farine et de riz, essayions d nous rendre utile, chacun à sa manière, et l’expérience de ces rencontres, de ces mouvements, de ces éclairs de contact et de reconnaissance, sans programme ni doctrine d’aucune sorte, était assez absorbante. Je ne me souviens plus de tous les noms, il y avait Jean-Pierre, Jean-François, Judith et son jeune fils Olivier, Michou la danseuse, son ami Michel, un autre Jean-Pierre ; Josiane et Frédéric sont arrivés, juste comme ça, deux prototypes de perfection , et les deux frères de Frédéric suivirent, et Edith, assistante d’O livenstein le psychiatre controversé, et Isabelle, et les déplacements et les partages s’articulaient sans aucun plan ni pesanteur ; et Claude et Liane et Anne R. ; un gars un peu sombre et tourmenté, nommé aussi Michel, nous amena la jeune femme qui était la mère de son petit enfant, Martine et Cyril – Cyril marchait à peine – et s’en fut de son côté. J’avais repris un peu de tissage et le travail du cuir ; que faire avec tous ces êtres, vers où marcher et vers quoi nous tendre ? Ma première préoccupation était de leur communiquer la seule chose qui avait pour moi la valeur d’un but et d’un chemin, la présence de Mère ; je me disais que si à travers moi quelqu’un pouvait se tourner vers Elle, j’a urais au moins servi à quelquechose. Entre cet enfant et moi, un lien s’établit presque aussitôt.

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