Un Parcours
Pour être acceptés dans les temples et nous mieux fondre dans les foules, j’avais choisi de me vêtir d’un longi et d’une tunique de coton noir ; chacun de ces temples respirait encore le souffle qui traverse les siè cles, de l’immensité de pierre détaillée de Thanjavur au bois ouvragé de Trivandrum, chaque seuil avait sa charge et sa force uniques. Je ne sais plus dans quel ordre nous voyageâmes ; de Rameshwaram nous nous en fûmes jusqu’au Cap Comorin et je me souviens d’un couple qui se prit d’intérêt pour le nôtre et nous invita, très dignement et simplement, à passer la nuit à quatre ; ils étaient comme nous en excursion, mais ils étaient de l’Inde, et semblai ent issus d’une classe sociale assez conséquente ; nous avons gentiment choisi de nous abstenir, peut-être en partie du fait que nous étions « en cours de cessation » : l’impulsion sexuelle ne nous animait presque plus ; une fois d’ailleurs, nous nous étions trouvés sans y penser ni le chercher dans une position de double asana, tout s’était comme immobilisé, nous étions alors dans la chambre de ce petit hôtel tout près de l’Ashram, et cette posture de calme offrande s’était présentée comme un sourire. Un s oir, nous venions d’arriver dans un petit village des collines entre le Kerala et le Tamil Nadu, où nous pensions rester un ou deux jours dans une loge forestière ; nous prenions un thé dans une échoppe au bord de la rue, de la seule rue, je crois, quand un petit groupe d’hommes e n pélérinage, tous vêtus de noir comme moi, s’arrêtèrent devant nous et m’invitèrent à me joindre à eux, laissant Fabienne dans la loge ; ils se rendaient au temple d’Ayappa, à une demi -journée de marche dans les bois, et il fallai t se hâter car c’était l’avant - dernier jour de l’ouverture annuelle ; pourquoi pas ? Fabienne était tranquille et n’avait aucune objection à rester seule un ou deux jours, il y avait de belles promenades à faire, le temps était très doux.
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