Un Parcours

interférence – la réponse de la Nature était si sûre !) ; il veillait aussi à la propreté des espaces extérieurs communs. Mais quand la construction de la maison commença, j’ en embauchai un troisième, pour accompagner les travaux et veiller à ce que les maçons et leurs aides aient tous les matériaux à portée de main – ces maçons qui, d’ailleurs, apprirent vite à redresser les tiges de fer et lier les armatures des poutres circulaires et des toits de ferrociment. Ce garçon, Y., plus jeune que les autres et pas encore marié, s’attachait à moi ; s ouvent il dormait dans l’appentis, lorsqu’il fallait arroser le ciment frais durant la nuit ; un soir, j’eus tout à coup le sentiment d’un accident et me rendis jusqu’à la construction et trouvai Y. étendu sur le sol trempé par la pluie, inconscient, près du boitier du disjoncteur ! De suite j’interrompis le courant en relevant la manette et emportai Y. dans mes bras jusqu’à notre hutte, le massant et lui faisant boire beaucoup d’eau dés qu’il fut un peu ranimé. Il se remit rapidement, mais cet épisode accrut son attachement et l’étrange attrait qu’il ressentait pour ce qu’il devinait être notre relation, à Cl. et à moi. J’aimais pouvoir ainsi, peu à peu, calmement, créer un environnement, tracer et définir des allées, des lieux de recueillement, les commencements de ce grand parc en forme de croissant qui rejoindrait éventuellement la « Nursery » (la pépinière réservée aux jardins du Matrimandir) et Narad, qui la dirigeait, m’avait donné un certain nombre de pousses d’arbres rares qui croissaient vigoureusement. Je ne me rendais pas toujours bien compte que, créatif et ne dépendant de personne, peu sociable et très épris de calme, discipliné et pourtant libre dans mes mœurs, j’éveillais parfois quelque méfiance ou ressentiment, dont les expressions me prenaient souvent au dépourvu ; mais ma priorité était de tout offrir à Mère et de m’en remettre à Elle pour tout. Gérard M. était probablement celui qui me comprenait ou m’acceptait le mieux et se confiait entièrement, partageait avec moi tous ses déboires comme tous ses sentiments et nous avions en commun une sorte d’intimité intérieure et directe avec le Matrimandir, qui était un Etre entier, une présence et un

170

Made with FlippingBook Digital Publishing Software