Un Parcours

Deuxième étape

Je crois qu’un ensemble de raisons présida au choix d’une nouvelle résidence : d’abord nous étions un peu à l’étroit et, bien qu’il ne s’agisse pas encore de clandestinité, il était préférable de recevoir les uns et les autres plus à l’abri des curieux ; puis je grandissais et il devenait indispensable de m’envoyer à l’école ; il y avait aussi des considérations économiques – nous n’étions vraiment pas riches et Colette devait travailler pour assurer le minimum (elle travailla même, quand le communisme disposait d’une certaine aura, comme secrétaire à France -URSS et fit partie d’une délégation qui visita les kolkhozes). Et voilà, notre cadre de vie changea tout à fait d’un jour à l’a utre : nous emmenageâmes dans un pavillon un peu délabré, au milieu d’un parc presque abandonné, juste en retrait du fameur Rond-Point du Petit Clamart (où il y eut une tentative d’assassinat du Général de Gaulle quelques années plus tard) ; nous occupions une partie du rez-de-chaussée et une chambre supplémentaire à l’étage pour Mamy ; il y avait une verrière attenante couverte de glycine et une végétation presque sauvage tout autour ; il y avait une allée principale depuis l’entrée du parc avec son pavillon dédié à la « conciergerie », qu’occupait une famille « mixte », le père « Indochinois », comme on disait alors, et la mère Française, et leurs deux filles, l’une aux cheveux de jais, Laurence, plus âgée que moi, qui devint mon amie, et sa sœur cadette, toute rousse, qui s’appelait Sylvie je crois ; Laurence et son père avaient des traits harmonieux et paisibles et des regards profonds ; le père, à la maison, portait souvent une sorte de kimono, je me sentais mieux avec eux.

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