Savitri - Book Five - Canto 1
B OOK F IVE – C ANTO 1 – T HE D ESTINED M EETING -P LACE L IVRE C INQ – C HANTE 1 – L E L IEU P REDESTINE DE LA R ENCONTRE
SAVITRI S RI A UROBINDO
French translation by: Divakar Jeanson www.divakar-publications.com
BOOK FIVE - The Book of Love
LIVRE CINQ – Le Livre de l’Amour
Canto One - The Destined Meeting-Place
Chant Un – Le Lieu Prédestiné de la Rencontre
But now the destined spot and hour were close; Unknowing she had neared her nameless goal. For though a dress of blind and devious chance Is laid upon the work of all-wise Fate, Our acts interpret an omniscient Force That dwells in the compelling stuff of things, And nothing happens in the cosmic play But at its time and in its foreseen place. To a space she came of soft and delicate air That seemed a sanctuary of youth and joy, A highland world of free and green delight Where spring and summer lay together and strove In indolent and amicable debate, Inarmed, disputing with laughter who should rule. There expectation beat wide sudden wings As if a soul had looked out from earth's face, And all that was in her felt a coming change And forgetting obvious joys and common dreams, Obedient to Time's call, to the spirit's fate,
Mais le lieu et l’heure étaient proches maintenant; Sans le savoir elle avait presque atteint son but. Car, bien que l’habit d’un hasard tortueux et aveugle Soit posé sur l’œuvre de la sage Destinée, Nos actes interprètent une Force omnisciente Qui habite la substance même des choses, Et rien n’arrive jamais dans le jeu cosmique Qu’en son temps et à sa place déterminée. Elle parvint dans l’espace d’un air délicat Tel un tendre sanctuaire de jeunesse et de joie, Une haute contrée de verdure, libre et heureuse, Où le printemps et l’été gisaient l’un contre l’autre Sans armes, dans l’indolence d’un débat amical, Se disputant en riant le droit de régner. Une attente y battit de grandes ailes soudaines, Comme si, de la terre, une âme avait regardé : Tout en elle sentait un changement imminent Et, oubliant les joies et les rêves habituels, Obéissant à l’appel du destin et du Temps, Etait soulevé à une beauté qui vivait Calme et pure sous les yeux de l’Eternité. Une presse de cimes assaillait le ciel Poussant des épaules plus près du soleil, Les meneurs en armure d’une armée de fer ; Prostrée, la terre gisait sous leur foulée de pierre.
Was lifted to a beauty calm and pure That lived under the eyes of Eternity.
A crowd of mountainous heads assailed the sky Pushing towards rival shoulders nearer heaven, The armoured leaders of an iron line; Earth prostrate lay beneath their feet of stone.
Below them crouched a dream of emerald woods And gleaming borders solitary as sleep: Pale waters ran like glimmering threads of pearl. A sigh was straying among happy leaves; Cool-perfumed with slow pleasure-burdened feet Faint stumbling breezes faltered among flowers. The white crane stood, a vivid motionless streak, Peacock and parrot jewelled soil and tree, The dove's soft moan enriched the enamoured air And fire-winged wild-drakes swam in silvery pools. Earth couched alone with her great lover Heaven, Uncovered to her consort's azure eye. In a luxurious ecstasy of joy She squandered the love-music of her notes, Wasting the passionate pattern of her blooms And festival riot of her scents and hues. A cry and leap and hurry was around, The stealthy footfalls of her chasing things, The shaggy emerald of her centaur mane, The gold and sapphire of her warmth and blaze. Magician of her rapt felicities, Blithe, sensuous-hearted, careless and divine, Life ran or hid in her delightful rooms; Behind all brooded Nature's grandiose calm. Primaeval peace was there and in its bosom Held undisturbed the strife of bird and beast. Man the deep-browed artificer had not come To lay his hand on happy inconscient things, Thought was not there nor the measurer, strong-eyed toil, Life had not learned its discord with its aim.
Plus bas, un songe d’émeraude était accroupi, Ses lisières solitaires comme le sommeil ; Des eaux pâles brillaient, telles des cordes de perle. Un soupir effleurait les feuilles joyeuses ; Fraîches, parfumées, leurs pas alourdis de plaisir, De douces brises chancelaient parmi les fleurs. La grue blanche se tenait droite, un trait immobile, Le paon et la perruche ornaient l’arbre et le sol, La colombe roucoulait dans la passion de l’air, Sur les mares d’argent flottaient les flammes des oies. La terre couchait seule avec le Ciel son amant, Découverte entièrement à son regard d’azur. Dans une extase de joie luxurieuse Elle dissipait la sérénade de ses notes Et la structure passionnée de ses fleurs Et la débauche de ses teintes et senteurs. Un cri, un bond, une hâte était alentour, Les pas furtifs de ses créatures en poursuite, La moire hirsute de sa crinière de centaure, L’or et le saphir de sa chaleur et son brasier. Magicienne de ses intenses félicités, Espiègle et sensuelle, insouciante et divine, La vie jouait dans ses chambres exquises ; Derrière tout, planait le calme de la Nature. La paix originelle était là et dans son sein Protégeait la lutte de l’oiseau et de la bête. L’homme, l’artificier au grand front, n’était pas venu Poser sa main sur les heureuses créatures,
Ni la pensée ni la mesure du labeur, Et la vie n’avait pas appris sa discorde.
2
The Mighty Mother lay outstretched at ease. All was in line with her first satisfied plan; Moved by a universal will of joy The trees bloomed in their green felicity And the wild children brooded not on pain. At the end reclined a stern and giant tract Of tangled depths and solemn questioning hills, Peaks like a bare austerity of the soul, Armoured, remote and desolately grand Like the thought-screened infinities that lie Behind the rapt smile of the Almighty's dance. A matted forest-head invaded heaven As if a blue-throated ascetic peered From the stone fastness of his mountain cell Regarding the brief gladness of the days; His vast extended spirit couched behind. A mighty murmur of immense retreat Besieged the ear, a sad and limitless call As of a soul retiring from the world. This was the scene which the ambiguous Mother Had chosen for her brief felicitous hour; Here in this solitude far from the world Her part she began in the world's joy and strife. Here were disclosed to her the mystic courts, The lurking doors of beauty and surprise, The wings that murmur in the golden house, The temple of sweetness and the fiery aisle.
La Puissante Mère s’étendait à son aise. Tout était encore aligné sur son premier plan ; Mus par une volonté de joie universelle Les arbres bourgeonnaient dans leur verte allégresse Et les enfants sauvages ignoraient la douleur. Au bout, reposait une aire géante et hautaine, Profondeurs enchevêtrées, collines solennelles Et pics dénudés - une austérité de l’âme, Armurée, distante, grandiose et désolée, Comme les infinités pensives qui gisent Derrière le sourire du Seigneur dans sa danse. Depuis le repaire de roc de sa montagne, Contemplait la gaieté éphémère des jours ; Son vaste esprit répandu reposait en arrière. Le grand murmure d’une immense retraite Assiégeait l’oreille, un appel triste, infini, Comme d’une âme se retirant du monde. Une tête de forêt envahissait le ciel Comme si l’ascète à la gorge bleuie, Telle était la scène que la Mère ambiguë Avait choisi pour son heure de bonheur ; Ici dans cette solitude loin du monde Elle prit son rôle dans la joie et la lutte. Ici les cours mystiques lui furent dévoilées, Les portes secrètes de surprise et de beauté, Les ailes qui murmurent dans la maison d’or, Le temple de douceur et l’allée de feu.
A stranger on the sorrowful roads of Time, Immortal under the yoke of death and fate,
Un étranger sur les routes pénibles du Temps, Immortel sous le joug de la mort et du sort
3
A sacrificant of the bliss and pain of the spheres, Love in the wilderness met Savitri.
Sacrifiant la joie des sphères et leur douleur, L’amour en ces lieux sauvages trouva Savitri.
End of Canto One
Fin du Chant Un
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