journal d'une transition

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Ainsi c’est vraiment la bataille entre Toi et celui qui s’est séparé de Toi, qui T’a reniée. Nous ne sommes rien. Nous n’avons pour Te servir que nos êtres psychiques, si toutefois nous sommes assez sincères. *27-3-1976, Auroville : Lorsqu’à la suite de petites disharmonies consécutives, de petits manquements à l’unité, de petites négations, je me retrouve dans cet état de tristesse que je connais bien, alors, et à chaque fois plus fort, se dresse ma seule vraie question, mon seul manque… Je ne sais pas comment l’appeler, c’est quelque chose que je regarde comme un impossible et qui me manque affreusement… La base, le fondement de la vie. Tout ce progrès qui est à faire, tout ce qui est dit, enseigné, parfois accompli, m’apparaît seulement comme un lent et difficile retour à la « normale » ; mais où est le vrai Progrès, le vrai Sens de Ta Vie ? Quand l’homme, l’âme humaine, est sorti de sa prison d’ignorance, quand il Te veut consciemment et ne veut plus que Toi, il est alors mené vers un nouvel équilibre, certainement supérieur à celui d’une nature aveugle… Mais après ? La manifestation est là ; c’est une constante activité – une obligation. Pourquoi ? Où es-Tu ? Que veux-Tu ? Alors la question grossit, s’intensifie : une incompréhension qui se charge. Et il n’y a qu’une réponse, qui marque pour ma conscience un Inconnu, dont la réalisation est u mystère total, et pourtant la seule chose désirable, la seule chose utile, la seule chose réelle : cela se nomme peut-être la Joie d’Etre – ou ce mot : Ananda. Alors s’il en est dans ce monde qui ont réalisé cela, qui sont devenus cela, qui sont tellement cela que pour eux la Manifestation est constamment comprise, aimée, harmonieuse, utile, une expression naturelle, évidente, consciente, de cet état fondamental, de ce secret, de ce cœur – eh bien, ils ont trouvé la solution de mon problème ! Il n’y a que Ca qui doit exister car sans Ca rien ne tient, rien n’existe, rien n’a de valeur ni de sens. Il faut que Tu prennes pitié de ces pantins, que Tu rentres en possession de Tes demeures ! Aucune force, aucun être, aucune intelligence ne peut créer ou produire cette seule chose nécessaire : Ta Joie d’Etre ! Et il me semble être seul avec ce vide, cette béance. L’ego n’est pas forcément ce qu’on croit… Je suis sûr que l’on peut être un modèle de droiture, de générosité, de constance, d’humilité même et être pourtant vide de Toi – une imitation, une création fausse, inutile. La morale de l’Asura est puissante dans le monde de l’ignorance – mais devant Ta Réalité, elle est impuissante absolument. *28-3-1976, Auroville : Il est vrai, je pourrais me laisser aller et couler encore une fois, retourner dans l’ombre humaine y enfouir ce désespoir, et je suis sûr qu’au bout de ça c’est Toi, seulement Toi que je trouverais… Mais quel gaspillage et tant a déjà été gaspillé, abîmé, réduit, brisé…

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