Un prochain pas

Comment respirer ?

Et pourtant, il y a érosion, il y a eu un processus d’usure intensive, d’érosion diligente et continue durant toutes ces dernières années de cultivation digitale, durant lesquelles une part de plus en plus majoritaire de l’humanité s’est trouvée graduellement abêtie, diminuée, possédée, accoutumée, abrutie, dissociée du vécu et de l’instant. Par la magie proliférante de l’informatique, le libre accès à tous les savoirs comme à tous les assouvissements virtuels lui a été procuré. Un vaste nivellement s’est ensuivi, par lequel toutes connaissances se valent et les plus hautes instances scientifiques ou éthiques sont vigoureusement contredites ou reniées ou démontées, jusqu’à ce que toute information quelle qu’elle soit acquière un impact et un pouvoir égal et le cynisme, le doute et la croyance se partagent le rite d’accueil sur le seuil de nos demeures personnelles. L’exercice même de la logique, cet exercice que chaque individu est censé pratiquer d’innombrables fois et en d’innombrables occasions dans son existence, est à présent mis à l’épreuve : il est demandé à chaque individu – cela est même exigé – d’y renoncer au profit d’une politique d’urgence impliquant tous les membres de la société à la fois et décrétant les mesures, les consignes et les règles que tous doivent dorénavant observer aussi longtemps que durera « la crise ». Cependant les « autorités » ne peuvent entièrement séquestrer l’humanité, ni la forcer à leur obéir à chaque instant et en tout point, même munies des instruments et des techniques de surveillance et de contrôle qui leur sont déjà accessibles. Les instructions dispensées, distribuées, propagées, ressassées jusqu’à l’abrutissement, sont sans appel : gestes « barrière », port du masque couvrant le nez et la bouche, écart de six pieds entre les corps, nettoyage

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