Un Parcours
émotionnelles ; souvent je me détestais, détestais cette impuissance malsaine qui me rendaient la proie de tous les attachements, d’attractio ns obsessionnelles comme d’indifférences brutales, que ce fut de ma part ou de celle d’un autre ; une énergie maligne me poussait à m’investir sans compter dans ces détresses ou désespoirs relationnels. Chez « nous », j’occupais encore la loggia de l’atelier, juste au dessus de la chambre lambrissée de Colette et René ; on y accédait par un escalier encastré autour d’un pilier de bois clair ; ce n’était guère privé, mais c’était mon espace personnel ; il arriva que je cédais un jour au vertige de l’e sclavage affectif, je crois qu’il s’agissait de l’attirance dont je ne pouvais plus me défaire envers Guillaume, et je pris une lame de rasoir dans la salle de bains et, à genoux sur mon lit, à l’abri, je laissai la frénésie destructrice s’emparer de ma vo lonté consciente, je tailladai mon avant-bras gauche, deux, trois fois, puis le sang tout à coup gicla et je dus émettre une plainte ou un cri, car René s’est alerté – il était étrangement intuitif - , a monté l’escalier, constaté la situation et sans hésit ation m’a garrotté le bras solidement, et m’a entraîne jusqu’en bas dans la rue et dans sa voiture et à l’hôpital où il avait son service pour qu’on noue ou (j’ai oublié le terme exact) remette l’artère en marche et recouse la plaie ouverte. Rien ne fut dit par la suite, rien ne me fut demandé ; le danger était écarté, une certaine compréhension inarticulée a choisi le calme et le silence confiants. Mais je devais co-habiter avec une sorte de force contraire, qui semblait guetter chaque occasion de me … quo i, annihiler, anéantir, repousser, arrêter, détruire… ?
J’ai eu ainsi plusieurs accidents, et toujours cela pouvait se produire à travers ma propre faiblesse, c’est -à-dire que je ne
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