Un Parcours

Et les travaux se terminèrent presque exactement neuf mois plus tard, le jour du Darshan du 24 Novembre.

Je fis construire avec les débris de la grande hutte une plateforme circulaire de deux pieds de hauteur sur laquelle Krishna m’aida à créer un jardin de cacti ; il se passionnait pour ces plantes, lui qui était né près du désert, mais s’investissait de plus en plus dans l’aménagement et l’afforestation de la ravine, édifiant plusieurs petits barrages successifs afin de contrôler le flot des eaux de la mousson et un à un plantant les arbres et les haies qui aideraient à consolider le sol. Pendant ces neuf mois, j’habitai avec Cl. dans la petite hutte que Joël avait laissée ; nous avions juste la place pour un grand matelas sur le sol et un peu de rangement et j’avais entreposé la plupart de mes affaires, surtout les livres, sous la garde de V. qui occupait la grande hutte laissée par Elie ; cet arrangement n’était pas exempt de tensions, puisque V. s’était attachée à moi avec l’idée de former un couple, mais était aussi intéressée par Cl. qui, lui, découvrait toute une partie de lui-même auprès de moi (cette promiscuité nous avait évidemment mis dans les bras l’un de l’autre et c’était intense). Nous travaillions ensemble, dormions ensemble, vivions ensemble et c’était souvent réjouissant de pouvoir s’exprimer ainsi sans hésitation, alors que, malgré toutes les affirmations de tous et chacun de se tourner vers l’avenir et de se libérer des carcans de la fausse morale, il demeurait parmi nous tous un certain degré de pudib onderie, de réprobation et d’esprit de paroisse ; mais nous avions quelques alliés, ainsi Jacqueline et Kiran qui vivaient ensemble dans une chambre du « Camp des Travailleurs du Matrimandir », défiant plusieurs degrés et plusieurs sources de condamnation à la fois, puisque Kiran était la fille de Navajata et avait fait ce choix incompréhensible pour sa famille de venir vivre à Auroville avec une compagne !

Les escarmouches, justement, se multipliaient avec les gens de la Société ou leurs employés et pour Kiran c’était assez éprouvant, car

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