Un Parcours
Divers procès furent intentés contre nombre d’entre nous par les « propriétaires » légaux, sur un prétexte fabriqué ou un autre et il fallut organiser une sorte de défense légale, que nous ne prenions pas trop au sérieux ; le grand bénéfice d e ces manœuvres nous revenait, puisque le Gouvernement ne pouvait expulser aucune personne contre laquelle une plainte avait été déposée. Sur une première liste de 9 personnes que la Société voulait expulser du pays, surtout des Français d’Aspiration, mon nom était inclus du fait de mon rejet officiel, alors que je n’avais pris aucune part aux incidents mentionnés. Mais il y eut une seconde liste, plus longue, près de 40 personnes je crois, lorsque nous fûmes arrêtés par dénonciation orchestrée, lors d’un rassemblement qui s’était voulu silencieux, auprès du Banyan, et emmenés par fourgons jusqu’à la prison de Tindivanam ; Krishna qui avait couru pour monter dans le dernier fourgon fut forcé d’en redescendre un peu plus loin sur la route, les policiers de service ne pouvant croire que, vue sa couleur de peau, il était également « coupable » ou « suspect »… Nous ne restâmes là que deux ou trois jours, mais cela fit grand bruit et donna au conflit un autre caractère, plus légendaire, plus symbolique, plus signifiant pour plus de monde ; quelque chose se passait, dans cet « Auroville », qui avait peut-être une importance universelle, d’un point de vue représentatif. Je me souviens d’un certain étonnement lorsque de vieux taxis nous déposèrent en bas de la route qui montait vers Aspiration, sales et fatigués, et nous fûmes embrassés par toute une tribu qui était descendue du plateau pour nous attendre et nous accueillir (c’est d’ailleurs à cet instant que je reçus le premier baiser de celle qui deviendrait la mère de ma fille, que je ne connaissais que de vue jusqu’alors). Colette me rendit sa première visite Aurovilienne en 1975 ; nous avions attendu que je puisse l’héberger à peu près convenablement, bien qu’il lui fallut s’adapter au manque de facilités « modernes » ; j’avais construit une petite salle d’eau d’un côte dans le jardin bourgeonnant et un abri plus petit encore pour les « toilettes » à l’indienne d’un autre côté, ce qui rendait les
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