Lettres à Divakar jusqu'à 2005
C’est pour cela que j’aspire tant à un élargissement d’Auroville qui me parait de plus en plus nécessaire pour éviter la sclérose. Même si cela n’est pas si important que je l’imagine, la venue de ces étudiants apportera un peu d’air, de nouvelles têtes. Vous en avez tous besoin ! J’ai la conviction qu’un certain nombre d’entre vous – et toi sûrement – vivez en deçà de vos possibilités, dans une sorte de retenue, de rareté – faute sans doute d’avoir les moyens de les réaliser ; et souvent je pense à ce que tu m’as dit en roulant vers Madras, sur la « vie réduite » : un comble à mes yeux quand je pense à tout ce qui est en toi ! Naturellement, je parle ici de ce versant aurovillien, et non de ces moments dont vous, dont tu fais l’expérience concrète ; de ces ouvertures, de ce grand chemin. Et cela me renvoie à ce que je te disais précédemment du rapport entre cette vie-là et notre vie quotidienne. Et je te comprends de t’en remettre à ton expérience personnelle du pas à pas. Quant à moi, il va falloir que tu me donnes le coup de main habituel pour me sortir de cette espèce de malaise, de mal être que j’éprouve décidément devant certaines Beautés : une maison solitaire devant un infini de mer sur fonds irisés, dans l’avant-pays de Fréhel, un calme absolu ; paysages étranges qui me comblent et me font un peu peur je crois. Mais surtout, c’est cette piètre économie, cette mauvaise distribution de l’émotion, comme si corps et esprit étaient trop étroits pour la contenir ou la faire mienne, je ne sais. Est-ce un mauvais équilibre au niveau du Vital ? J’ai des « explications » psychanalytiques qui ne sont pas fausses, mais elles ne m’aident guère. (J’ajoute que, bien sûr, nous avons vu partir le beau voilier soviétique … pouf, mon cœur !).
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