Au sujet d'Auroville 2022-2025

précision et les capacités de gestion et de direction de Piero C. ; mais lorsque toute la structure de béton fut réalisée, la question de l’érection de la coque, de son revêtement et de son apparence finale s’était levée devant nous tous. Les vents des polémiques – qui avaient déjà soufflé plusieurs fois, comme lors de la construction de la Chambre dodécagonale : quelles devaient être les mesures exactes, devaient-elles être prises entre les murs, de leur surface extérieure ou du milieu de leur épaisseur, ou de quelle matière devait être le globe translucide au centre de l’espace, ou bien encore ces douze colonnes étaient-elles vraiment nécessaires… - avaient repris une grande vigueur. En fait, le sujet s’était déjà naturellement présenté plusieurs années auparavant : comment réaliser l’armature de la coque entre les quatre arcs verticaux ; les partisans et fidèles de Roger, qui avaient travaillé avec lui aux premiers temps, prônaient vivement le choix d’une structure métallique, relativeme nt légère et maniable, sur laquelle les éléments de « décoration » seraient arrimés ; cette option correspondait à l’approche de Roger qui considérait comme nécessaire une certaine plasticité offrant la possibilité de changements ultérieurs ; l’autre point de vue reposait sur des instructions écrites de Mère quant aux qualités requises pour la construction de Son temple – solidité, durée, stabilité, harmonie - ; dans cette perspective, l’étude qu’avaient déjà faite les ingénieurs responsables de tous les calculs pour la structure en béton armé, d’une armature géodésique de poutres de béton, nous semblait préférable, bien qu’elle demanderait plus de temps et de travail pour sa réalisation ; l’équipe des travailleurs du Matrimandir, dont je faisais alors partie, avait tranché, de même qu’elle l’avait fait pour la manufacture et la pose des douze colonnes dans la Chambre intérieure (tout simplement parce que Mère les avait vues), et nous avions dû nous atteler à une entreprise assez colossale – la fabrication et la pose de centaines de poutres en rangées de triangles. Puis une nouvelle fois et avec plus d’intensité, le débat s’était présenté devant l’entière communauté : durant toutes ces années, nous avions tous vécu jour et nuit physiquement conscients de la présence majestueuse de cet « être » de béton au centre de l’espace d’Auroville, qui croissait et graduellement définissait son volume et sa grâce ; Matrimandir était pour nous tous un être à part entière, un ami central à tous nos cheminements ; à chaque étape de son érection, depuis son apparence de vaisseau immobile s’ouvrant vers le ciel, jusqu’à celle de ses membres tendus pour se rejoindre, et à sa présente forme de sphère ouverte aux éléments, c’était comme un destin central qui s’accomplissait, mais aussi le symbole de notre demeure intérieure. Nous savions tous, et attendions ce moment, que cette sphère encore ajourée, communiquant encore avec la lumière et l’air et les arbres croissant autour d’elle, se refermerait comme une coquille protectrice pour abriter le lieu de concentration silencieuse intemporelle dédié et réservé à la Conscience-Force de Vérité, mais cette communication émotionnelle et physique avec la vie d’Auroville, avec le monde, ne pouvait-on la préserver ? Ainsi certains avaient-ils rêvé d’une autre solution : poser de grands triangles de verre sur l’armature de béton, qui arrêteraient la pluie et la poussière mais laisseraient passer la lumière et les impressions de l’environnement naturel.

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