2021 Défaire les murs et aller

Sémion parle encore très peu, mais cette économie n’offense nullement nos voisins, au contraire, ils l’apprécient et saluent en lui un soldat du silence. Au début, dans les mois qui suivirent notre dernier retour ici, accompagnés de Sémion, nous guettions des signes ou des stigmates des épreuves qu’il avait certai nement dû endurer ; l’administration de l’institution qui l’avait hébergé ne nous avait fourni que des documents visiblement bâclés qui ne nous apprenaient presque rien de ses premières années de vie ; son âge probable était indiqué comme 11 ans ; dans les circonstances chaotiques des déplacements forcés de la population locale, les autorités avaient été plus qu’indulgentes et nous avaient officiellement donné leur assentiment pour que nous en prenions la garde légale. Mais il s’avéra graduellement qu’il n’était réellement entré dans le monde qu’avec notre rencontre, comme s’il s’était gardé figé ou inatteignable dans une sorte de gangue énergétique qui le rendait étranger à son environnement, et qu’il n’avait laissé l’atteindre que certains mouvements émotionnels authentiques. Et depuis, sans que s’impose aucune volonté ni obligation, il s’est dé-voilé, animé, graduellement, avec une grande concentration pure de tout calcul, simplement en côtoyant l’un ou l’autre membres de notre assemblée : d’abord, il se recueillait souvent dans ton aire de musique, s’y baignant presque immobile ; puis il commença de participer, un geste puis un autre, au jardinage, puis à découvrir des mouvements, des expressions corporelles auprès de Gomat, à observer sans distraction l es manœuvres et les maniements de Martin comme de Zeidr, à s’essayer aux exercices gymnastes méditatifs avec Jul et Jen. Et spontanément, sans aucune tension ni pression externe, il aime revenir à l’entretien, il aime que les choses, les objets, les lieux matériels

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