2021 Défaire les murs et aller

sensible du potager ou du verger, comme nous découvrons sans cesse l’art de l’eau – l’ea u qui compose les cellules de nos corps, la densité de l’air, la fécondité du sol, la pesanteur mouvante de l’océan, l’assainissement de nos peaux et de nos espaces communs.

Ce matin Sémion et moi sommes allés, avec le petit chariot que Martin a construit (Martin, notre inventeur et mécanicien), chercher une cargaison de céréales et de millets dans les fermes adjacentes : nous aimons particulièrement faire ça ensemble, c’est comme un doux festival d’émotions à deux, d’une proximité qui n’a pas d’âge et ne dépend d’aucun lieu, d’une reconnaissance qui va, qui va, confiante dans le soleil de douceur qui nous attend. Pour atteindre les fermes, qui s’étendent donc de part et d’autre du chemin qui descend à la presqu’île, il faut remonter jusqu’à la clairière, puis traverser le bois – ce sont surtout des peupliers, des noisetiers, des arbousiers, des églantines, des mûriers, et aussi des sortes de fougères -, cela prend quelques minutes à bon pas, puis continuer jusqu’aux entrées latérales des deux fermes, à peu près à mi-chemin de la petite route de voisinage qui remonte en boucle vers la plus proche bourgade. Les deux familles de fermiers sont des gens de la terre, robustes, discrets, bienveillants, mais généralement méfiants du brouhaha prétentieux du monde « extérieur ».

Ils ne nous jugent pas, ils nous ont adoptés.

Et je crois qu’ils nous ont intériorisés, c’est -à- dire qu’ils nous accordent un rôle ou une présence dans leur vie intérieure silencieuse.

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