un autre choix

Sans que nous puissions comprendre comment, désigner une cause ou l’action d’une loi quelconque, un déplacement s’est effectué dans notre conscience et notre sens d’exister.

Notre centre n’est plus dans la volonté personnelle, mais dans une qualité de besoin, que nous reconnaissons sans pourtant jamais l’avoir vécu : une sorte d’aspiration gratuite, parfois presque douloureuse, qui s’élance nulle part mais semble pleine et sûre.

Peut-être y a-t-il à présent en nous une insatisfaction, qui nous envahit comme une marée étale.

Nous nous trouvons privés des motivations qui semblent pourtant animer tous les autres, sans avoir de nouvelles ou meilleures raisons d’agir ou d’entreprendre quoique ce soit.

Les possibilités offertes par cette condition humaine nous apparaissent alors dérisoires.

Ou bien, c’est comme un souvenir qui nous hante, presque un effluve, ou une mélopée, nous rappelant à une vie plus pleine, plus libre, plus dense.

Ou bien nous éprouvons – est-ce une émotion, est-ce un sentiment ? – envers un visage aperçu, les couleurs d’un ciel sur la ville, le parfum d’un rosier, le passage d’un vol de mouettes, le regard d’un chien, la démarche familière d’une geisha, quelque chose comme un élan très intense mais très clair que notre nature est pourtant incapable d’exprimer sans le trahir.

Quelque chose qui, à ces instants de trouée, change pour nous le sens du verbe « aimer ».

***

Tandis que l’ivraie s’éparpille, le grain commence à germer.

***

81

Made with FlippingBook flipbook maker