journal d'une transition
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*8-6-2000, Auroville : Ce sont d’étranges symétries : depuis quelques jours, à la demande de Vishvanath de l’Ashram, j’ai placé l’équipe d’Anand sur le toit des chambres de Sri Aurobindo, tout autour de Ta chambre, pour le réimperméabiliser ; et voilà que je dois arpenter et parcourir, en examinant les moindres détails, cet espace plus sacré qu’aucun autre ; voilà que sur ce même Balcon où Tu es apparue tant de fois mon équipe plie et range ses affaires ; et voilà que je dois porter l’attention sur la séparation de tous ces matériaux hétéroclites qui composent ce milieu plus que tout autre béni… Et je retrouve là encore une fois cette position ou cette fonction qui correspond en partie, qui résonne en partie, comme depuis l’éternité, la fonction de l’intendant, à la fois impersonnelle et intime avec l’acte qui s’effectue et la force qui s’incarne. Et malgré tout ce qui s’est passé, malgré toutes les lâchetés et les petitesses, j’aime toujours l’atmosphère de l’Ashram, et ces gens sont toujours ma famille ! Quoique l’on puisse dire de l’Ashram, ce que Tu as réalisé en certains de ces êtres est sans précédent et sans comparaison – ce Vishvanath, par exemple, qui, à 95 ans, travaille comme il a travaillé toute sa vie pour Toi, arrive à son bureau à 8 h chaque matin, visite les chantiers, monte et descend les échelles, s’intéresse à tous les détails avec cette fraîcheur et cette calme souplesse qui ne se compromet jamais, car elle est toujours fondée… *9-6-2000, Auroville : On peut se demander : qu’apprenons-nous ici, en Auroville ? Que devenons-nous capables de percevoir et de manifester dont la valeur soit proportionnelle au privilège de liberté et de sécurité qui nous y est donné ? … La nouvelle équipe de forage vient d’atteindre ici la profondeur de 145 pieds : une eau pure dans un beau milieu de graviers ; nous avons comblé l’ancien puits d’argile noire, juste à un mètre du nouveau ; il faut maintenant insérer et descendre le nouveau tuyau de plastique. … La chaleur est venteuse et agitée, les arbres sont secoués de rafales poussiéreuses ; il faut boire des litres d’eau pour rester composé ! Praful et Vishvanath m’ont amené dans la salle de bains de Sri Aurobindo, où il fallait retirer quelques carreaux qui avaient craqué et s’était en partie détachés d’un mur – des carreaux qui avaient été posés en 1936 ! Anand et moi avons fait le travail, dans ce silence chargé de conscience et d’aise, et c’était comme si je respirais enfin de l’air vrai, après des âges d’un état indéfini et sans joie ! Et dans la pièce adjacente, j’ai trouvé Minnie, et cela aussi m’a fait du bien ! *12-6-2000, Auroville : Réponse de Robert Laffont, qui a mal compris ma dernière lettre (lettre qui a mis 2 mois à lui parvenir !) ; il me suggère encore une autre Maison d’Edition, dont je n’ai jamais entendu parler, les Editions Bussière ; je ne comprends pas tout ça : Laffont avait nommé sa propre collection « Aider la Vie », et jugé que mon texte ne lui conviendrait pas, ne s’y vendrait pas… N’y a-t-il donc rien dans mon texte qui *11-6-2000, Auroville : Hier matin, quelques moments de bonheur !
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