Un Parcours

rue Henri Monnier, qui montait en pente raide vers la place Pigalle.

Nous sommes restés là plusieurs années ; en fait, Francis était plus souvent absent que présent, soit qu’il devait séjourner dans un sanatorium – il avait hérité de ses frasques en Espagne, enfermé dans un camp franquiste d’interneme nt où il avait eu ses vingt ans, une tuberculose pulmonaire assortie d’un dommage intestinal chronique et m’avait même légué une « primo infection », ce qui d’après les dires de nos amis docteurs, équivalait à une immunisation à vie - , soit qu’il s’aventur ait sur le terrain Algérien, lui et Colette s’étant pris d’affection pour ceux qui tentaient d’organiser une lutte active contre la colonisation de l’Algérie par la France, ou plutôt, pour la reconquête de son indépendance. Ils étaient déjà allés ensemble y faire une première exploration et de cette expérience initiale avaient coécrit un premier livre « Notre Guerre ». Mais ce « nous » incluait déjà deux autres personnes, au quotidien, ainsi que bien d’autres qui aimaient à y faire halte ; il y avait « Mamy » Marie Dagorne, une « vieille fille » bretonne qui s’était épris e de moi lorsque nous étions sur une plage de Saint Briac et je pouvais encore à peine tenir debout et Colette cherchait une femme qui pourrait la seconder, puisqu’elle devait aussi travailler et ne pouvait s’occuper de moi à plein temps ; et donc, cette ad orable célibataire, d’une cinquantaine d’années déjà, avait pris la décision de venir vivre avec nous à Paris – elle possédait la moitié d’une maison bretonne dont elle avait hérité et souhaita bientôt que nous l’adoptions avec elle. Et il y avait le père de Colette, qui était donc mon grand-père ; la mère de Colette était décédée des années auparavant, c’étaient de « petites gens », mais elle avait une envergure et une

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