Tome 2 Défaire les murs et aller

Neuvième dimanche

C’est un jour gris, le gris de la perle ou de l’opale, très calme et l’air y est vif et actif, comme un bain de repos vivifiant, que nous avons presque tout entier passé sur le triangle devant l’océan, chacun s’en éloignant seulement pour des tâches ponctu elles – une journée entre parenthèses que nous apprécions pleinement ; ce lieu même est une bénédiction, qui engage le corps et le soutient et l’énergise, qui apaise et nettoie, qui ouvre et inspire ; Jul et Jen y ont au cours des années disposé et aménagé les éléments et les supports d’un développement physique élargi . Chacun de nous a sa propre discipline, découverte et articulée petit à petit, mais l’on y pratique souvent et spontanément des exercices en commun, ou bien simplement pour s’entraîner mutuel lement, comme la course ou le saut ou même le tir à l’arc ou le jonglage. Les corps y communiquent sans effort leurs aspirations, leurs états de maintien, d’équilibre ou de quête, et la concentration de chacun contribue à celle des autres et la complémente ; ainsi par exemple il y a une densité distincte qui émane des mouvements de Cleïm, notre aîné, qui nous sert à tous, sans y penser, de repère, comme il y a un rythme mesuré, presque incantatoire, dans ceux de Zeidr, lorsqu’elle arpente et virevolte et se dresse et se tend aux quatre vents.

Peut-être cela vient-il en partie des « rêves » ou activités de la nuit, et en partie d’un constat à l’échelle de la Terre entière du degré de nocivité de la race humaine, malgré toute la noblesse et la tendresse et la richesse dont elle est habitée : c’est une

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