Tome 2 Défaire les murs et aller

Il faut dire aussi que, en fait, c’est la première fois que chacun pourra découvrir calmement et individuellement tout ce que les autres ont partagé, car jusqu’à présent, tous les témoignages, enregistrés et transcrits, étaient restés sous ma garde ; de même, à part Gomat et toi, compositeurs des lieux, des agencements et des accompagnements sonores, aucun autre n’avait directem ent le sens du déroulement entier des tableaux ou des épisodes, puisque nous y avions tous travaillé pêle-mêle et sans ordre établi. Déjà, le fait que chacun de ces douze adolescents ait, à la faveur de cet exercice collectif qui dure depuis des semaines, pu réaliser la valeur, l’importance et la place d’une expérience que chacun d’eux avait cru inexplicable et tout à fait privée, expérience qui nous était déjà, ici, commune et l’essence même de notre cheminement, a relativisé la distinction entre eux et nous, eux les élèves et nous les « éducateurs » ; mais aujourd’hui j’ai senti comme une absurdité : nous ne savons rien de l’avenir, rien même de nos progressions respectives, et je vois surtout que nous allons pouvoir ensemble aborder tous les sujets depuis une autre perspective, tous et n’importe quel sujet !

Avec ce qui me reste de fonds émotionnel personnel, le sentiment le plus défini, le plus clair, est celui qu’ l’on a devant le « sacré », en présence du sacré ; et pourtant, tout ne devrait-il pas nous l’inspirer ?

C’était tout de même l’heure quotidienne des questions et Chardon a levé ses deux mains en riant : « bon, je vais peut-être

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