Tome 2 Défaire les murs et aller

Douzième samedi

La fraîcheur était vive, à cette aube, et nous étions tous emmitouflés lorsque nous nous sommes rejoints devant l’océan émergeant de la brume ; tous les petits drapeaux que nous avions plantés l’autre jour se redressaient dans la brise naissante et leurs couleurs se distinguaient déjà ; puis nous nous sommes mis à marcher, chacun à son allur e, autour de l’espace ouvert et Martin a opéré le diffuseur et ta musique s’est annoncée, puis répandue, nous accompagnant et nous soutenant et délivrant nos élans : d’abord les rythmes d’une cavalcade régulière, forte, sûre, entraînante, magnifique et simple à la fois ; puis, peu à peu, des tonalités distinctes, comme porteuses d’états à découvrir… Curieusement, une première sorte de lancinance mesurée, engageante, a ravivé un élan sexuel dans mon corps, ou peut- être une intensité correspondante, une jouissance de la rencontre de l’autre au - dedans d’un même mouvement toujours nouveau, toujours nu, toujours vierge vers un abandon de plaisir partagé. Puis c’est devenu une a ise profonde, libre de toute attente et disponible, attentive, et aussi comme un regard droit et net, qui appréhende sans rien projeter. Lorsqu’on est à l’écoute dans ce courant vertical de conscience - force, on n’a pas l’impression que les instruments act uels, les facultés mentales ou émotives par exemple, soient appelées à disparaître, mais plutôt qu’après une période de silencieuse conversion, elles trouveront leurs nouvelles fonctions au service de la conscience souveraine pour son action dans le monde ; il me semble que, de même, ces procédés énergétiques présidant à l’activité sexuelle trouveront aussi leur utilité, leur plus grande valeur de mutualité au service d’une existence plus entière et

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