Lettres à Divakar jusqu'à 2005

Il y a quelques années, de prison où il se trouvait pour plusieurs mois, il m’avait écrit pour me demander de l’argent, puis pour que je me mette en rapport avec son avocat. Je l’avais fait ; j’ai oublié les détails. Plus tard, 1 ou 2 nouvelles demandes, assorties de maintes protestations d’amitié. Entre temps il était venu à la maison. Bon. Et puis il y a environ 1 mois, une nouvelle lettre de prison pleine « d’amour » et une demande d’argent pour s’acheter du savon, etc. Et là commence pour moi une drôle d’expérience : sans pouvoir l’expliquer « objectivement » sa lettre m’a déplu. Incapable d’y répondre. Quant à l’argent, je décide de lui en adresser et … j’oublie chaque jour de le faire. J’y parviens quand même, mais je comprends qu’un tel oubli de ma part a une signification. Il m’envoie une lettre de remerciements, qui me déplait plus encore ! Et avant-hier il débarque à la maison : bien habillé (trop bien) et le visage tuméfié à la suite d’une bagarre dans la rue. Discours sur son amitié pour toi et moi, sur la « sincérité », et demande de 500 FF pour prendre le train jusqu’à Aix (où il a « beaucoup d’argent »). D’énormes contradictions avec ce qu’il m’avait écrit, etc. Et, alors que je peux comprendre, que je le sens paumé, prisonnier vraiment, je n’ai pu lui donner que 100 FF et le reconduire le plus rapidement possible jusqu’à la porte. L’expérience c’est cela : une force inconnue qui passait par le corps, une sorte de conscience physique plus forte que la part « compréhensive » de moi, et qui m’obligeait véritablement à me garder d’un certain contact, à refuser – une répulsion envers une autre force, tellement tangible que j’en étaie en même temps presque émerveillée comme d’une découverte !

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