Lettres à Divakar jusqu'à 2005

On sortait, et le moindre sou que mon père avait en poche était utilisé pour l’apéritif de 6 heures et nos rêveries aux terrasses des cafés (la Coupole, la Closerie)… Mais avant cette divine heure, il y avait les interminables marches, ma mère et moi bras dessus bras dessous (mauvais pour la marche, non ?!) partageant notre goût pour le silence entrecoupé de confidences – et derrière mon père infatigable marcheur, avançant, avançant, guidé par son infaillible sens de l’orientation. Ainsi ces marches étaient-elles pour moi totalement subies, à la fois parce que l’enfant suit ses parents et parce que nous suivions mon père dans une quasi inconscience de la topographie des lieux. A la fin de ces promenades en tout cas, - et mon corps en a aujourd’hui le souvenir précis – je me plaignais d’avoir « mal aux épaules ». En fin de compte, je crois que cet ennui dont je te parle actuellement correspond d’une part à ce pli de passivité ancien, et surtout je pense à une inquiétude, mais pas mentale, une inquiétude du corps qui s’attend à ressentir de la fatigue (en fait … j’en avais « plein le dos », d’autant plus que je me souviens avoir entendu, durant toute mon enfance : « tiens-toi droite ! »). Tout à l’heure, durant une séance de massage, j’ai eu un instant très nouveau : l’impression que j’avais UN corps, et non plusieurs parties – peut-être le travail du centre qui commence à me réunir ? Juste la place de te dire que je suis là, avec vous, dans la belle Maison – le beau vaisseau. Je vous embrasse tendrement, avec Force, A bientôt,

Colette.

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