Lettres à Divakar jusqu'à 2005

Elle travailla ainsi, par exemple, assez longtemps, pour une Association qui souhaitait promouvoir l’amitié entre le peuple français et les peuples soviétiques (« France URSS »). L’énorme avantage de ce lieu où désormais nous vivions était la liberté et la beauté naturelle ; si nous étions presque pauvres, nous avions cependant l’entier loisir de ces espaces où croissait une profusion de roses sauvages et de pivoines entre les buis, les cognassiers et les arbres forestiers, et nous disposions d’une grande verrière entièrement recouverte d’une glycine, dont le parfum est demeuré à jamais dans nos vies. Francis faisait de rares, « héroïques » apparitions en grand secret ; il était alors activement poursuivi par les polices gouvernementales – la DST particulièrement – et il fut éventuellement condamné par contumace à de très lourdes peines. Ou bien il s’arrangeait pour que Colette et moi puissent le rencontrer – lui, le Chef du Réseau de Soutien au FLN – incognito dans quelque restaurant discrètement huppé où il arrivait en Mercedes et versait du whisky sur le « steak tartare » dont il avait la recette exclusive, et j’avais alors pour interlocuteurs attentifs tel ou tel membre du réseau, et souvent des femmes éplorées qui aimaient se confier à ma patiente écoute… Il arrivait aussi, lorsque je fus considéré assez mûr (vers l’âge de 10 ou 11 ans) que l’on me munisse de faux papiers d’identité pour aller seul en Belgique ou en Suisse retrouver Francis ; c’est ainsi que je rencontrai Christiane, qui fut sa compagne jusqu’à la fin de ses jours. Puis une nouvelle charnière opéra dans la vie de Colette, dans notre vie. Elle avait rencontré René, qui venait d’un tout autre milieu. Elle eut un grave accident de voiture au retour d’une mission clandestine, suivi de longs mois d’immobilisation à la merci

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