Lettres à Divakar jusqu'à 2005

Elle eut plusieurs postes de secrétaire, et c’est dans cette fonction dans une maison d’édition qu’elle rencontra Francis, mon père physique : jeune philosophe, professeur agrégé, (de 9 ans son cadet) il était venu là au sujet d’un livre qu’il souhaitait publier. Il était alors un ardent disciple de Jean Paul Sartre. Il avait, lui, pendant la guerre, rejoint les forces anti- fascistes en Espagne, où il avait été incarcéré dans un camp de détention pendant près d’une année. Il avait découvert en lui-même, à la faveur de cette rude expérience, des capacités de dialogue et d’animation, de motivation et d’orientation, qu’il développa tout au long de sa vie au service de telle ou telle cause, mais toujours de l’émancipation de la personne individuelle au sein d’une société dont chacun se doit de devenir un participant aussi conscient que possible. Pour Colette, ce fut un autre horizon, éveillant en elle d’autres potentiels. Ils se marièrent quelque temps avant ma naissance. Pendant mes 6 premières années, de 1950 à 1956, nous vécûmes à Pigalle, au pied de la butte Montmartre dominée par le Sacré Cœur. Colette avait eu un accouchement si difficile et douloureux qu’elle résolut de rédiger un livre qui illustrerait et enseignerait une technique nouvelle de respiration et d’accompagnement – « L’accouchement Sans Douleur » -, livre qui fut bien utile à un très grand nombre de femmes. Colette et Francis ensemble rencontrèrent à cette époque beaucoup d’ « intellectuels » parmi les plus anti- conformistes – tel Jean Genet qui venait souvent nous rendre visite lorsqu’il faisait ses tournées à Pigalle, et l’affection qui se forma alors entre lui et moi, enfant de 4, 5 et 6 ans, ne s’est jamais effacée - ; mais aussi, autant dans le quartier même que dans leurs voyages, ils se prirent d’une amitié profonde pour un certain nombre d’Algériens, et

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