Lettres à Divakar jusqu'à 2005

Je pense que ce ne fut qu’en 1975 que Colette put venir me rendre visite dans la hutte que nous partagions à plusieurs, à Sincérité, non loin de notre chantier, le Matrimandir.

Puis, elle revint chaque année.

Je ne me souviens pas pourquoi je n’ai gardé aucune de ses lettres jusqu’en 1981, où comment je les aurais perdues. Ces années qui suivirent la disparition de Mère furent pour les premiers Aurovilliens une période cruciale qui mit leur loyauté à l’épreuve et les obligea à une intense et difficile vérification de leur choix. Il leur fallait en même temps apprendre à se diriger et à naviguer entre les diverses agences corruptrices de l’entreprise d’Auroville – internes et externes -, et à trouver à chaque pas des solutions pratiques à des situations presque impossibles, tout en essayant de retrouver, chacun et ensemble, la présence de Mère, le Guide intérieur. Colette, dés qu’elle put constater la profondeur et l’ampleur de la gageure qui nous était offerte, et mesurer par elle- même la créativité et la force évolutrice qui agissaient et travaillaient sur nous, en nous et par nous, se sentit à son tour sollicitée. Elle observa avec un certain émerveillement la concrétisation de potentiels surprenants : moi qui n’avais aucune discipline, n’avais en quelque sorte presque rien appris, voilà que je me mettais à construire des maisons, à travailler dur sur un chantier spectaculaire dans des conditions physiques exigeantes, à créer un vaste jardin, à organiser des équipes, à cuisiner… Elle rencontra d’autres Aurovilliens, dont certains lui devinrent très proches, et leur contact et leurs expériences respectives confirmèrent pour elle l’extraordinaire souffle de progrès et de devenir que portait Auroville. Et, devant l’évidente pénurie qui fut la nôtre durant de longues années – nous manquions de tout -, elle put concevoir sa participation à l’expérience en termes concrets

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