Savitri - Book Seven - Canto 5

BOOK SEVEN - The Book of Yoga

LIVRE SEPT – Le Livre du Yoga

Canto Five - The Finding of the Soul

Chant Cinq – La Découverte de l’Ame

Onward she passed seeking the soul's mystic cave.

Et elle s’en fut, cherchant la caverne de l’âme.

At first she stepped into a night of God. The light was quenched that helps the labouring world, The power that struggles and stumbles in our life; This inefficient mind gave up its thoughts, The striving heart its unavailing hopes. All knowledge failed and the Idea's forms And Wisdom screened in awe her lowly head Feeling a Truth too great for thought or speech, Formless, ineffable, for ever the same. An innocent and holy Ignorance Adored like one who worships formless God The unseen Light she could not claim nor own. In a simple purity of emptiness Her mind knelt down before the unknowable. All was abolished save her naked self And the prostrate yearning of her surrendered heart: There was no strength in her, no pride of force; The lofty burning of desire had sunk Ashamed, a vanity of separate self, The hope of spiritual greatness fled, Salvation she asked not nor a heavenly crown:

D’abord, dans une nuit de Dieu elle s’avança. La lumière s’éteignit qui aide le monde, Le pouvoir qui lutte et trébuche dans notre vie ; Le mental impuissant abandonna ses pensées Et le cœur son effort et ses espoirs infructueux. La connaissance échoua, toute forme de l’Idée, Et la Sagesse, de crainte sacrée, voila sa tête, Sentant une Vérité infiniment grande, Par-delà la pensée ou la parole, éternelle. Innocente, une sainte Ignorance adora, Tel celui qui rend culte à un Dieu sans forme, Cette Lumière qu’elle ne pouvait posséder. Dans une pureté de simple vacuité Son mental s’agenouilla devant l’inconnaissable. Tout était aboli, seul demeurait son soi nu Et l’élan prostré de son cœur soumis et offert : Il n’y avait plus de force en elle ni d’orgueil ; La brûlure altière du désir avait sombré Honteuse, une vanité du soi séparé, L’espoir de grandeur spirituelle s’était enfui, Elle ne demandait ni le salut ni la couronne : L’humilité même semblait un état trop fier. Son soi n’était rien, Dieu seul existait : Ceci elle savait, sans pourtant Le connaître.

Humility seemed now too proud a state. Her self was nothing, God alone was all, Yet God she knew not but only knew he was.

A sacred darkness brooded now within, The world was a deep darkness great and nude. This void held more than all the teeming worlds, This blank felt more than all that Time has borne, This dark knew dumbly, immensely the Unknown. But all was formless, voiceless, infinite. As might a shadow walk in a shadowy scene, A small nought passing through a mightier Nought, A night of person in a bare outline In endless Time her soul reached a wide end, The spaceless Vast became her spirit's place. At last a change approached, the emptiness broke; A wave rippled within, the world had stirred; Once more her inner self became her space. There was felt a blissful nearness to the goal; Heaven leaned low to kiss the sacred hill, The air trembled with passion and delight. A rose of splendour on a tree of dreams, The face of Dawn out of mooned twilight grew. Day came, priest of a sacrifice of joy Into the worshipping silence of her world; He carried immortal lustre as his robe, Trailed heaven like a purple scarf and wore As his vermilion caste-mark a red sun. As if an old remembered dream come true, She recognised in her prophetic mind The imperishable lustre of that sky, The tremulous sweetness of that happy air Crossing a fathomless impersonal Night, Silent she moved, empty and absolute.

Une ténèbre sublime régnait maintenant, Le monde était une ténèbre, nue et profonde. Ce vide contenait plus que la somme des mondes, Eprouvait plus que tout l’ensemble du Temps Et connaissait, immensément, l’Inconnaissable. Mais il n’y avait ni voix ni forme ni limite. Telle une ombre qui s’achemine dans l’ombre, Un petit rien qui passe dans un Rien plus grand, Une nuit de personne à peine esquissée Dans une Nuit impersonnelle insondable, Silencieuse elle allait, vide et absolue. Dans cet infini son âme atteignit une issue, Ce Vaste inconnu devint le lieu de son esprit. Un changement s’approcha, le vide se rompit ; Une vague ondoya, le monde avait remué ; Son être intérieur devint à nouveau son espace. Il y avait une proximité bienheureuse ; Le ciel incliné baisait la colline sacrée, L’air frémissait d’une passion délicieuse. Une rose de splendeur sur un arbre de songes, Dans l’aube sous la lune poignit l’Aurore. Advint le Jour, prêtre d’un sacrifice de joie Dans le silence adorateur de son monde ; Un lustre immortel était sa robe, et le ciel Etait son étole empourprée, et un soleil Vermillon la marque de sa caste sur son front. Tel un vieux rêve souvenu qui devient réel, Elle reconnut dans son esprit prophétique L’éclat impérissable de ce firmament, L’heureuse et vibrante douceur de cet air

2

And, covered from mind's view and life's approach, The mystic cavern in the sacred hill And knew the dwelling of her secret soul. As if in some Elysian occult depth, Truth's last retreat from thought's profaning touch, As if in a rock-temple's solitude hid, God's refuge from an ignorant worshipping world, It lay withdrawn even from life's inner sense, Receding from the entangled heart's desire. A marvellous brooding twilight met the eyes And a holy stillness held that voiceless space. An awful dimness wrapped the great rock-doors Carved in the massive stone of Matter's trance. Two golden serpents round the lintel curled, Enveloping it with their pure and dreadful strength, Looked out with wisdom's deep and luminous eyes. An eagle covered it with wide conquering wings: Flames of self-lost immobile reverie, Doves crowded the grey musing cornices Like sculptured postures of white-bosomed peace. Across the threshold's sleep she entered in And found herself amid great figures of gods Conscious in stone and living without breath, Watching with fixed regard the soul of man,

Et, invisible au mental, à l’abri de la vie, La caverne dans la colline mystique Qui était la demeure de son âme secrète. Comme en une occulte profondeur Elyséenne, Retraite inaccessible à la pensée profane, Ou dans la solitude d’un temple de roc, Ultime refuge de Dieu d’un culte ignorant, C’était retiré même du sens intérieur De la vie, de l’atteinte confuse du cœur. Un merveilleux demi-jour accueillait le regard Et un calme béni contenait cet espace. Une pénombre environnait les portes rocheuses Creusées dans la masse de la transe matérielle. Deux serpents d’or s’enroulaient autour du linteau, L’enveloppant de leur pure et terrible énergie, Leurs yeux lumineux d’une sagesse profonde. Un aigle le couvrait de ses ailes conquérantes ; Flammes immobiles de rêverie absorbée, Des colombes se pressaient sur les grises corniches Telles de blanches postures sculptées de la paix. Franchissant le sommeil de ce seuil elle entra Et se trouva parmi de grandes formes de dieux, Conscients dans la pierre et vivants sans un souffle, Observant l’âme de l’homme de leur yeux fixes, Figures exécutives de l’être cosmique, Symboles mondiaux de puissance immuable. Sur les parois couvertes de formes éloquentes La regardaient les scènes de l’homme et de la bête Et le sens élevé de l’existence des dieux, Le pouvoir et la nécessité de tous ces mondes,

Executive figures of the cosmic self, World-symbols of immutable potency.

On the walls covered with significant shapes Looked at her the life-scene of man and beast And the high meaning of the life of gods, The power and necessity of these numberless worlds,

3

And faces of beings and stretches of world-space Spoke the succinct and inexhaustible Hieratic message of the climbing planes. In their immensitude signing infinity They were the extension of the self of God And housed, impassively receiving all, His figures and his small and mighty acts And his passion and his birth and life and death And his return to immortality. To the abiding and eternal is their climb, To the pure existence everywhere the same, To the sheer consciousness and the absolute force And the unimaginable and formless bliss, To the mirth in Time and the timeless mystery Of the triune being who is all and one And yet is no one but himself apart. There was no step of breathing men, no sound, Only the living nearness of the soul. Yet all the worlds and God himself were there, For every symbol was a reality And brought the presence which had given it life. All this she saw and inly felt and knew Not by some thought of mind but by the self. A light not born of sun or moon or fire, A light that dwelt within and saw within Shedding an intimate visibility Made secrecy more revealing than the word: Our sight and sense are a fallible gaze and touch And only the spirit's vision is wholly true.

Et des visages d’êtres, des étendues d’univers Exprimaient le succinct et l’inexhaustible Message hiératique des plans ascendants. Dans leur immensitude signant l’infinité Ils étaient l’extension du soi même de Dieu Et recueillaient, impassiblement recevant tout, Ses figures et ses actes petits et sublimes, Sa passion et sa naissance et sa vie et sa mort Et son retour à l’immortalité. Au permanent et à l’éternel est leur montée, A la pure existence partout la même, A la conscience totale et la force absolue Et l’entière, inimaginable béatitude, A l’allégresse dans le Temps et au mystère De ce triple soi qui est tout et qui est un Et n’est pourtant rien autre que soi-même. Il n’y avait aucun souffle humain, aucun son, Seulement la proximité vivante de l’âme. Mais tous les mondes et Dieu lui-même étaient là, Car chaque symbole était une réalité, Portant la présence qui lui avait donné vie. Tout ceci elle voyait et sentait et savait Non par une pensée du mental, mais par le soi. Sans l’aide du soleil, de la lune ou du feu, Une clarté qui vivait et voyait au-dedans, Répandant une intime visibilité, Rendait le secret plus révélateur que le mot : Faillibles sont notre regard et notre toucher : Seule est entièrement vraie la vision de l’esprit.

As thus she passed in that mysterious place

Et, ainsi qu’elle pénétrait ce lieu mystérieux,

4

Through room and room, through door and rock-hewn door, She felt herself made one with all she saw. A sealed identity within her woke; She knew herself the Beloved of the Supreme: These Gods and Goddesses were he and she: The Mother was she of Beauty and Delight, The Word in Brahma's vast creating clasp, The World-Puissance on almighty Shiva's lap,— The Master and the Mother of all lives Watching the worlds their twin regard had made, And Krishna and Radha for ever entwined in bliss, The Adorer and Adored self-lost and one. In the last chamber on a golden seat One sat whose shape no vision could define; Only one felt the world's unattainable fount, A Power of which she was a straying Force, An invisible Beauty, goal of the world's desire, A Sun of which all knowledge is a beam, A Greatness without whom no life could be.

De chambre en chambre et de porte en porte de roc, Elle devint une avec tout ce qu’elle voyait. Une identité au-dedans d’elle s’éveilla ; Elle sut qu’elle était la Bien-aimée du Suprême : Ces Dieux et ces Déesses étaient lui et elle : La Mère était-elle, de la Beauté et de la Joie, Le Verbe dans l’étreinte de Brahma créateur, La grande Puissance sur les genoux de Shiva, - Le Maître et la Mère de toutes les existences Veillant les mondes crées par leur double regard, Dans la dernière chambre sur un siège d’or Quelqu’un se tenait, une Forme indescriptible ; L’on sentait seulement la source de l’univers, Un Pouvoir dont elle était une Force égarée, Une invisible Beauté, le seul but véritable, Un Soleil dont toute la connaissance est un rai, Une Grandeur sans qui rien ne pourrait exister. Tout, de là, se retira dans le soi silencieux, Et tout devint pur et neutre et dépouillé. Alors, par un tunnel creusé dans le dernier roc, Elle parvint où resplendissait un soleil. Une demeure était là, de flamme et de lumière Et, franchissant une paroi vivante de feu, Là, soudainement elle rencontra son âme. Un être était là, immortel dans l’éphémère, L’impérissable jouant avec les instants Et, dans ses grands yeux de bonheur tranquille Et Krishna et Radha pour toujours enlacés, Unis, absorbés, l’Adoratrice et l’Adoré.

Thence all departed into silent self, And all became formless and pure and bare. Then through a tunnel dug in the last rock She came out where there shone a deathless sun. A house was there all made of flame and light And crossing a wall of doorless living fire There suddenly she met her secret soul. A being stood immortal in transience, Deathless dallying with momentary things, In whose wide eyes of tranquil happiness

5

Which pity and sorrow could not abrogate Infinity turned its gaze on finite shapes: Observer of the silent steps of the hours, Eternity upheld the minute's acts And the passing scenes of the Everlasting's play. In the mystery of its selecting will, In the Divine Comedy a participant, The Spirit's conscious representative, God's delegate in our humanity, Comrade of the universe, the Transcendent's ray, She had come into the mortal body's room To play at ball with Time and Circumstance. A joy in the world her master movement here, The passion of the game lighted her eyes: A smile on her lips welcomed earth's bliss and grief, A laugh was her return to pleasure and pain. All things she saw as a masquerade of Truth Disguised in the costumes of Ignorance, Crossing the years to immortality; All she could front with the strong spirit's peace. She puts forth a small portion of herself, A being no bigger than the thumb of man Into a hidden region of the heart To face the pang and to forget the bliss, To share the suffering and endure earth's wounds And labour mid the labour of the stars. This in us laughs and weeps, suffers the stroke, Exults in victory, struggles for the crown; But since she knows the toil of mind and life As a mother feels and shares her children's lives,

Que ni chagrin ni pitié ne pouvaient abroger, L’Infinité regardait les formes finies ; Observant la marche silencieuse des heures, L’Eternité soutenait les actes du moment Et les scènes transitoires du Jeu perpétuel. Dans le mystère de la Volonté sélective, Participante dans la Divine Comédie, La représentante consciente de l’Esprit, La déléguée de Dieu dans notre humanité, Amie de l’univers et rayon du Transcendant, Elle était venue dans l’espace du corps mortel Pour jouer avec le Temps et la Circonstance. Une joie dans le monde son maître mouvement, La passion du jeu éclairait ses yeux : d’un sourire Elle accueillait le bonheur et le chagrin terrestres Et d’un rire elle traitait le plaisir et la peine, - Ce monde une mascarade de la Vérité Déguisée dans les costumes de l’Ignorance, Traversant les années jusqu’à l’immortalité ; Elle rencontrait tout avec la paix de l’esprit. Mais puisqu’elle connaît le labeur de nos parts Comme une mère éprouve les vies de ses enfants, Elle met en avant une portion d’elle-même, Un être pas plus gros que le pouce d’un homme Dans une région secrète au fond du coeur Pour braver la peine, oublier la félicité, Partager la souffrance, endurer les blessures Et oeuvrer parmi les travaux des étoiles. Cela en nous rie et sanglote et subit les coups, Exulte dans la victoire, lutte pour la couronne ;

6

Identified with the mind and body and life, It takes on itself their anguish and defeat, Bleeds with Fate's whips and hangs upon the cross,

Identifié au mental, au corps et à la vie, Cela assume leur angoisse et leur défaite, Saigne sous les fouets et pend sur la croix, Et pourtant, indemne, demeure immortel Soutenant l’acteur dans la scène humaine.

Yet is the unwounded and immortal self Supporting the actor in the human scene.

Through this she sends us her glory and her powers, Pushes to wisdom's heights, through misery's gulfs; She gives us strength to do our daily task And sympathy that partakes of others' grief And the little strength we have to help our race, We who must fill the role of the universe Acting itself out in a slight human shape And on our shoulders carry the struggling world. This is in us the godhead small and marred; In this human portion of divinity She seats the greatness of the Soul in Time To uplift from light to light, from power to power, Till on a heavenly peak it stands, a king. In body weak, in its heart an invincible might, It climbs stumbling, held up by an unseen hand, A toiling spirit in a mortal shape. Here in this chamber of flame and light they met; They looked upon each other, knew themselves, The secret deity and its human part, The calm immortal and the struggling soul. Then with a magic transformation's speed They rushed into each other and grew one. Once more she was human upon earthly soil In the muttering night amid the rain-swept woods And the rude cottage where she sat in trance:

Ainsi nous envoie-t-elle sa gloire et ses pouvoirs Pour franchir la misère et monter à la sagesse, Et la force d’accomplir la tâche quotidienne, La sympathie qui prend sa part du malheur d’autrui Et le peu que nous pouvons pour aider notre race, - Nous qui devons remplir le rôle de l’univers Se jouant dans une fragile forme humaine Et sur nos épaules porter le monde en effort. Telle est en nous, petite, abîmée, la déité ; Dans cette portion humaine de divinité Elle assoie dans le Temps la grandeur de l’Ame Pour l’élever dans la lumière et dans le pouvoir, Jusqu’à se tenir souveraine sur les cimes. Faible dans le corps, mais dans son cœur invincible, Trébuchante elle monte, tenue par la main, Un esprit qui peine dans une forme mortelle. Ici dans cette chambre de flamme et de lumière Elles se regardèrent et se reconnurent, La déité secrète et sa part humaine, La calme immortelle et l’âme combattante. Dans l’instant magique d’une transformation Elles se ruèrent l’une en l’autre et s’unirent. Elle était humaine à nouveau sur la terre Dans la nuit des bois balayés par la pluie Et la chaumière rustique, assise, encore en transe :

7

That subtle world withdrew deeply within Behind the sun-veil of the inner sight. But now the half-opened lotus bud of her heart Had bloomed and stood disclosed to the earthly ray; In an image shone revealed her secret soul. There was no wall severing the soul and mind, No mystic fence guarding from the claims of life.

Ce monde subtil se retira profondément Derrière un voile solaire de vue intérieure. Mais le bouton de lotus entrouvert de son coeur S’était épanoui, ouvert au rayon de la terre ; Dans une image révélée, rayonnait son âme : Il n’y avait plus de mur entre elle et le mental, Ni de clôture mystique abritant de la vie. Dans son foyer de lotus, son être était sis Comme sur le marbre de la concentration, Appelant la Mère puissante des mondes A faire de ce terrestre habitat sa demeure. Comme en un éclair d’une lumière supérieure, Une image vive du Pouvoir originel, Un visage, une forme descendit dans son coeur Et en fit son temple et sa pure habitation. Mais quand ses pieds touchèrent la corolle tremblante, Un puissant mouvement secoua l’espace intérieur, Comme si un monde, ébranlé, se trouvait lui-même : De la nuit inerte et sans âme de l’Inconscient, Se leva du sommeil un Serpent flamboyant. Déroulant un à un ses anneaux il se dressa Et, montant puissamment comme un orage ascendant, Il toucha ses centres de sa bouche enflammée ; Leur somnolence rompue par cet ardent baiser Ils s’ouvrirent et rirent surchargés de lumière. Puis à la couronne il se joignit à l’Eternel. Dans la fleur de la tête, dans la fleur de la base, Dans chaque divin bastion et noeud de la Nature Il conduisit le courant mystique qui joint Les sommets ignorés aux profondeurs invisibles,

In its deep lotus home her being sat As if on concentration's marble seat, Calling the mighty Mother of the worlds To make this earthly tenement her house.

As in a flash from a supernal light, A living image of the original Power, A face, a form came down into her heart And made of it its temple and pure abode. But when its feet had touched the quivering bloom, A mighty movement rocked the inner space As if a world were shaken and found its soul: Out of the Inconscient's soulless mindless night A flaming Serpent rose released from sleep. It rose billowing its coils and stood erect And climbing mightily, stormily on its way It touched her centres with its flaming mouth; As if a fiery kiss had broken their sleep, They bloomed and laughed surcharged with light and bliss. Then at the crown it joined the Eternal's space. In the flower of the head, in the flower of Matter's base, In each divine stronghold and Nature-knot It held together the mystic stream which joins The viewless summits with the unseen depths,

8

The string of forts that make the frail defence Safeguarding us against the enormous world, Our lines of self-expression in its Vast. An image sat of the original Power Wearing the mighty Mother's form and face. Armed, bearer of the weapon and the sign Whose occult might no magic can imitate, Manifold yet one she sat, a guardian force: A saviour gesture stretched her lifted arm, And symbol of some native cosmic strength, A sacred beast lay prone below her feet, A silent flame-eyed mass of living force. All underwent a high celestial change: Breaking the black Inconscient's blind mute wall, Effacing the circles of the Ignorance, Powers and divinities burst flaming forth; Each part of the being trembling with delight Lay overwhelmed with tides of happiness And saw her hand in every circumstance And felt her touch in every limb and cell. In the country of the lotus of the head Which thinking mind has made its busy space, In the castle of the lotus twixt the brows Whence it shoots the arrows of its sight and will, In the passage of the lotus of the throat Where speech must rise and the expressing mind And the heart's impulse run towards word and act, A glad uplift and a new working came. The immortal's thoughts displaced our bounded view, The immortal's thoughts earth's drab idea and sense;

Le cordon des fortins qui composent la défense Nous sauvegardant de l’énorme univers, Nos lignes de communication dans son Vaste. Cette figure de la Force originelle Portait la forme et le visage de la Mère. Elle s’assit, tenant l’arme et le signe Qu’aucune magie ne peut imiter, Multiple et pourtant une, puissance gardienne : Un geste sauveur étendait son bras levé Et, symbole d’une énergie cosmique native, Une bête sacrée gisait sous ses pieds, Une masse silencieuse aux yeux de flamme. Tout alors subit un sublime changement : Brisant la muraille aveugle du noir Inconscient, Effaçant tous les cercles de l’Ignorance, Jaillirent des pouvoirs et des divinités ; Chaque partie de l’être tremblant de plaisir, Submergée par des marées de bonheur, Voyait Sa main divine dans chaque circonstance Et La sentait dans chaque membre et chaque cellule. Dans la contrée du lotus de la tête Dont le mental a fait son espace affairé, Dans le château du lotus entre les sourcils D’où il jette ses flèches de vouloir visionnaire, Dans le passage du lotus de la gorge Où surgissent la parole et l’expression mentale Et s’élance l’impulsion vers les mots et vers l’acte, Advint un joyeux élan, un nouveau procédé. Des pensées immortelles ouvraient notre horizon, Remplaçant les mornes perceptions de la terre ;

9

All things now bore a deeper heavenlier sense. A glad clear harmony marked their truth's outline, Reset the balance and measures of the world. Each shape showed its occult design, unveiled God's meaning in it for which it was made And the vivid splendour of his artist thought. A channel of the mighty Mother's choice, The immortal's will took into its calm control Our blind or erring government of life; A loose republic once of wants and needs, Then bowed to the uncertain sovereign mind, Life now obeyed to a diviner rule And every act became an act of God. In the kingdom of the lotus of the heart Love chanting its pure hymeneal hymn Made life and body mirrors of sacred joy And all the emotions gave themselves to God. In the navel lotus' broad imperial range Its proud ambitions and its master lusts Were tamed into instruments of a great calm sway To do a work of God on earthly soil. In the narrow nether centre's petty parts Its childish game of daily dwarf desires Was changed into a sweet and boisterous play, A romp of little gods with life in Time. In the deep place where once the Serpent slept, There came a grip on Matter's giant powers For large utilities in life's little space; A firm ground was made for Heaven's descending might.

Tout portait un sens plus profond et plus élevé. Une claire harmonie signalait toute chose, Restaurant l’équilibre et les mesures du monde. Chaque forme montrait son occulte principe, L’intention de Dieu en elle qui fut sa cause Et la vive splendeur de Sa pensée artiste. Un canal pour le choix de la puissante Mère, L’immortel alors prit sous son calme contrôle Notre gouvernement erratique de la vie ; Autrefois république de besoins et d’envies, Puis soumise au souverain mental incertain, La vie maintenant obéissait au divin Et chaque acte devenait un acte de Dieu. Dans le royaume du lotus autour du coeur L’Amour, chantant son hymne de pure hyménée, Fit de la vie et du corps des miroirs de la joie Et toutes les émotions se donnèrent à Dieu. Dans l’aire impériale du lotus du nombril, Ses fières ambitions et ses fortes jouissances Domptées par une calme influence devinrent Des instruments d’une œuvre de Dieu sur la terre. Dans les parts mesquines de l’étroit centre inférieur, Son jeu puéril de petits désirs quotidiens Devint une tendre turbulence et un chahut D’enfants dieux jouant avec la vie dans le Temps. Dans le lieu profond où jadis dormait le Serpent, Vint une emprise sur les pouvoirs de la Matière Pour de larges services dans l’espace vital ; Un terrain pour accueillir la puissance du Ciel.

Behind all reigned her sovereign deathless soul:

Derrière tout, régnait son âme impérissable :

10

Casting aside its veil of Ignorance, Allied to gods and cosmic beings and powers It built the harmony of its human state; Surrendered into the great World-Mother's hands Only she obeyed her sole supreme behest In the enigma of the Inconscient's world. A secret soul behind supporting all Is master and witness of our ignorant life, Admits the Person's look and Nature's role. But once the hidden doors are flung apart Then the veiled king steps out in Nature's front; A Light comes down into the Ignorance, Its heavy painful knot loosens its grasp: The mind becomes a mastered instrument And life a hue and figure of the soul. All happily grows towards knowledge and towards bliss. A divine Puissance then takes Nature's place And pushes the movements of our body and mind; Possessor of our passionate hopes and dreams, The beloved despot of our thoughts and acts, She streams into us with her unbound force, Into mortal limbs the Immortal's rapture and power. An inner law of beauty shapes our lives; Our words become the natural speech of Truth,

S’étant défaite de son voile d’Ignorance, Alliée aux dieux, aux pouvoirs et aux êtres cosmiques, Elle érigeait l’harmonie de son état humain ; Livrée aux mains de la Mère universelle Elle n’obéissait qu’à son ordre suprême Dans l’énigme du monde de l’Inconscient. Un être secret en arrière soutenant tout, Maître et témoin de notre vie ignorante, admet L’oeil de la Personne et le rôle de la Nature. Mais une fois ouvertes les portes cachées, Alors le roi voilé s’avance dans le monde, Une Lumière descend dans l’Ignorance Et son nœud lourd et douloureux se desserre : Le mental devient un instrument maîtrisé Et la vie une figure et nuance de l’âme. Tout alors grandit vers la connaissance et la joie. Une Puissance divine, et non plus la Nature, Anime notre corps et notre intelligence ; Possédant nos espoirs et nos rêves passionnés, Despote bien-aimée de nos pensées et nos actes, Elle afflue en nous avec sa force illimitée, L’extase et le pouvoir de l’Immortel dans nos membres. Une loi intérieure de beauté nous façonne, Nous apprenons le langage de la Vérité, Chaque pensée est une onde de son océan. Alors le péché et la vertu quittent les lices ; Ils ne combattent plus dans nos cœurs délivrés : Nos actes s’accordent au Bien divin naturel Ou servent la règle d’un Droit supérieur. Toutes les humeurs vilaines, mauvaises et fausses

Each thought is a ripple on a sea of Light. Then sin and virtue leave the cosmic lists; They struggle no more in our delivered hearts: Our acts chime with God's simple natural good

Or serve the rule of a supernal Right. All moods unlovely, evil and untrue

11

Forsake their stations in fierce disarray And hide their shame in the subconscient's dusk. Then lifts the mind a cry of victory: “O soul, my soul, we have created Heaven, Within we have found the kingdom here of God, His fortress built in a loud ignorant world. Our life is entrenched between two rivers of Light, We have turned space into a gulf of peace And made the body a Capitol of bliss. What more, what more, if more must still be done?” In the slow process of the evolving spirit, In the brief stade between a death and birth A first perfection's stage is reached at last; Out of the wood and stone of our nature's stuff A temple is shaped where the high gods could live. Even if the struggling world is left outside One man's perfection still can save the world. There is won a new proximity to the skies,

Abandonnent leurs stations en violent désarroi Et cachent leur honte dans l’ombre subconsciente. Résonne alors dans le mental un cri de victoire : « O mon âme, nous avons créé le Paradis, Nous avons ici trouvé le royaume de Dieu, Bâti sa forteresse dans un monde ignorant, Entre deux flots de Lumière arrimé notre vie, Aménagé tout l’espace en un gouffre de paix Et notre corps en un Temple de félicité. Quoi de plus, si plus encore doit être accompli ? » Dans le lent processus évolutif de l’esprit, Dans cette brève étape entre mort et naissance Un premier stade de perfection est atteint ; De la pierre et du bois de notre nature un temple Est façonné où les hauts dieux pourraient vivre. Même si le monde en lutte est laissé au-dehors La perfection d’un homme peut sauver le monde. Une nouvelle alliance avec les cieux est acquise, Premier engagement entre la Terre et le Ciel, Un concordat entre la Vérité et la Vie : Un camp de Dieu est dressé dans le temps humain.

A first betrothal of the Earth to Heaven, A deep concordat between Truth and Life: A camp of God is pitched in human time.

Fin du Chant Cinq

End of Canto Five

12

Made with FlippingBook - Online catalogs